Page:Baudelaire - Œuvres posthumes 1908.djvu/368

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sur la rive opposée du bras de mer. Il était encore plus vain de son adresse à tirer le pistolet et de ses hauts faits aquatiques que de sa renommée littéraire. L’orig-inalité était, dans sa famille, disposition héréditaire , mais son grand-père avait abusé de la permission. Le vieux lord Byron se rendit illustre par ses folies et ses emportements. Un jour, son cocher se laisse couper par un autre équipag’c ;le lord furieux saisit un des pistolets chargés qu’il portait toujours auprès de lui (manie qu’eut aussi le poète), il brûle la cervelle au serviteur mal appris, jette le cadavre dans la voiture aux pieds de ladj Byron, monte sur le siège et conduit les chevaux. Une dispute s’élève une fois entre ses gardes-chasse et ceux de son voisin, sir John Chaworth ; ce misérable incident occasionne entre le lord et le baronet une dispute à l’issue d’un dîner de corps ; ils veulent se battre à la minute et à bout portant ; un ami officieux fournit des pistolets ; les’ combattants étaient si acharnés que, si on les eût laissés faire, les extrémités des canons de leurs armes se serait touchées ; on eut bien de la peine à obtenir d’eux qu’ils se missent aux deux angles du salon. Ils s’y placent, le signal est donné, les deux coups partent ; Chaworth tombe atteintau cœur ; sa balle s’était enfoncée dans le mur. Lord Byron fut jugé par la Chambre des pairs comme accusé de meurtre ; il invoqua pour sa défense quelques vieux privilèges de la pairie : il en fut quitte pour une amende ; mais elle ne fut pas considérable. De retour chez lui, il se confina dans la retraite ; il fît tout ce qu’il put pour ruiner son fils, coupable de s’être marié sans sa permission ; il ne pouvait le priver d’un