Page:Baudelaire - Curiosités esthétiques 1868.djvu/189

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M. Gudin compromet de plus en plus sa réputation. À mesure que le public voit de la bonne peinture, il se détache des artistes les plus populaires, s’ils ne peuvent plus lui donner la même quantité de plaisir. M. Gudin rentre pour moi dans la classe des gens qui bouchent leurs plaies avec une chair artificielle, des mauvais chanteurs dont on dit qu’ils sont de grands acteurs, et des peintres poétiques.

M. Jules Noël a fait une fort belle marine, d’une belle et claire couleur, rayonnante et gaie. Une grande felouque, aux couleurs et aux formes singulières, se repose dans un grand port, où circule et nage toute la lumière de l’Orient. — Peut-être un peu trop de coloriage et pas assez d’unité. — Mais M. Jules Noël a certainement trop de talent pour n’en pas avoir davantage, et il est sans doute de ceux qui s’imposent le progrès journalier. — Du reste, le succès qu’obtient cette toile prouve que, dans tous les genres, le public aujourd’hui est prêt à faire un aimable accueil à tous les noms nouveaux.




M. Kiorboë est un de ces anciens et fastueux peintres qui savaient si bien décorer ces nobles salles à manger, qu’on se figure pleines de chasseurs affamés et glorieux. La peinture de M. Kiorboë est joyeuse et puissante, sa couleur est facile et harmonieuse. — Le drame du Piége à loup ne se comprend pas assez facilement,