Page:Baudelaire - Lettres 1841-1866.djvu/234

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miration pour une femme adorablement mince et d’un genre de beauté florentine. — Comment n’avez-vous pas deviné que Calonné, qui est un pédant, a dû se dire (après le bon à tirer) : Faut-il que ce Baudelaire soit ignorant ! il prend la terminaison de l’ablatif pluriel (bonis) pour celle du génitif singulier, qui est toujours un i. — Quant au reste de votre critique, je réponds par le travail d’imagination que j’ai fait, et que le lecteur intelligent doit faire : qu’est-ce que l’enfant aime si passionnément dans sa mère, dans sa bonne, dans sa sœur aimée ? Est-ce simplement l’être qui le nourrit, le peigne, le lave et le berce ? C’est aussi la caresse et la volupté sensuelle. Pour l’enfant, cette caresse s’exprime à l’insu de la femme, par toutes les grâces de la femme. Il aime donc sa mère, sa sœur, sa nourrice, pour le chatouillement agréable du satin et de la fourrure, pour le parfum de la gorge et des cheveux, pour le cliquetis des bijoux, pour le jeu des rubans, etc…, pour tout ce mundus muliebris, commençant à la chemise et s’exprimant même par le mobilier, où la femme met l’empreinte de son sexe. Donc, j’ai raison ; donc, je n’ai pas fait une faute de latin. Mais, dites-vous, vous faites une faute de français avec votre monde féminin. C’est vrai, et pour montrer que je le fais consciencieusement et sciemment, je souligne le monde. Comme en réalité il y a quelque chose de juste dans votre critique, j’essaie de vous contenter par un remaniement, et je vous prie de me dire si vous en êtes content.