Page:Baudelaire - Lettres 1841-1866.djvu/68

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gens prétendent qu’elles doivent les trouver tout à fait naturelles, et d’autres, qu’elles en doivent rire. Ils ne les supposent donc que vaniteuses, ou cyniques. Pour moi, il me semble que les âmes bien faites ne peuvent être que fières et heureuses de leur action bienfaitrice. Je ne sais si jamais cette douceur suprême me sera accordée de vous entretenir moi-même de la puissance que vous avez acquise sur moi et de l’irradiation perpétuelle que votre image crée dans mon cerveau. Je suis simplement heureux, pour le moment présent, de vous jurer de nouveau que jamais amour ne fut plus désintéressé, plus idéal, plus pénétré de respect, que celui que je nourris secrètement pour vous, et que je cacherai toujours avec le soin que ce tendre respect me commande.

Que diras-ta, ce soir, pauvre âme solitaire,
Que diras-tu, mon cœur, cœur autrefois flétri,
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


À MADAME SABATIER
Lundi, 8 Mai 1854.

Il y a bien longtemps, Madame, bien longtemps que ces vers sont écrits. — Toujours la même déplorable habitude, la rêverie et l’anonyme. — Est-ce la honte de ce ridicule anonyme, est-ce la crainte que les vers ne soient mauvais et que l’habileté n’ait pas répondu à la hauteur des sentiments, qui m’ont rendu, cette fois, si hésitant et si