Page:Baudelaire - Petits poèmes en prose 1868.djvu/472

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nerre témoigna qu’il avait fâché l’Esprit, et la lumière s’éteignit à l’instant.

La voix répéta la question. Sempronius prononça, en tremblant, le nom de « la prêtresse d’Éphèse ! »

Une musique riche et douce ondoya de nouveau sur les vagues de l’air. Une muraille de l’appartement sembla disparaître et s’ouvrir sur la mer, au soleil couchant. Ce n’était pas la mer languissante qui caresse les rives de la Campanie ; c’était la mer agitée et clapoteuse de la Grèce. Une longue rangée de constructions en marbre, surmontées de statues merveilleuses, s’élevait du sein des eaux. Callias s’écria : « Le Pirée ! » et montra du doigt, avec un geste d’étonnement, la trirème qui semblait fendre les flots et s’élever vers la pleine mer.

— Ses démons sont merveilleusement obéissants, murmura Callias. Mais où veut-il en venir ?

La trirème s’avançait dans les îles et fendait l’onde comme si elle avait eu des ailes. Elle aborda aux rives d’Ionie. Sempronius sentit battre son cœur, quand il revit les glorieux rayons de ce ciel d’Asie illuminant la terre bien connue de ses rêves. Le sortilège continuait victorieusement. Deux belles figures, un Grec et un Italien, parurent sous les ombrages de cyprès qui entourent le temple de Diane. Une troisième figure survint, les emmena, et toutes trois plongèrent dans les ténèbres.

— Pour le coup, dit Callias à l’oreille de son compagnon, s’il nous fait voir ce qui s’est passé dans