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Page:Baudelaire - Œuvres posthumes 1908.djvu/73

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— Fouille, Carabin, nerfs, ventre, cervelle. Dénude les os, découpe les chairs. Pour connaître à fond celle qui fut belle, Ne craignons ni sang- corrompu ni vers.

Quand nous n’aurons plus qu’un amas informe, Qued’épars tronçons d’un cadavre mou, Comme un vieux chien mort, afin qu’elle y dorme. Nous la jetterons au fond d’un grand trou.


LE CHIEN MORT (l)

Nous étions tous les deux dans le jardin où pousse

La violette au bord de l’eau, Et, la main dans la main, sur l’étroit banc de mousse.

Nous regardions le clair ruisseau.

Car les eaux en chantant coulaient resplendissantes

Aux rayons du grand soleil d’or... Sur un lit de lichens, parmi les fleurs brillantes

Devant nous gisait un chien mort.

Les bousiers d’azur avec les mouches vertes

Fourmillaient sur l’amas gluant ; Les yeux étaient rongés, les entrailles ouvertes,

Le ventre suintait béant ;

Le sang s’était caillé dans les poils de la bête. Coagulés en noirs grumeaux ;

(1) La Liberté, i5 février 1872. — Il ressort d’un article : Hier et demain, Un effacé volontaire, paru k la Lanterne sans signature le ao avril 1888^ que le Chien Mort est un pastiche d’Amëdée Cloux. L’auleur raconte notamment : « L’éditeur Pincebourde, — un nom prédestiné — qui t’tait en train de faire une édition de Beaudelaire {sic), y comprit pieusement le Chien Mort, et ce ne fut que sur l’aveu même de Cloux, lequel eut pitié de lui, qu’il le fil disparaî- tre.»