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LE CURÉ LABELLE

cinq cents paroissiens remplis de charité et de bonnes intentions. Le nouveau curé se jeta à genoux sur la porte de son presbytère et remercia Dieu de sa miséricorde qui le mettait à même d’exécuter un dessein qu’il avait déjà formé depuis longtemps. Durant les douze années de ministère qu’il venait d’accomplir dans les environs de Montréal et les contrées les plus peuplées d’anciens colons, le curé Labelle avait reconnu et touché du doigt la plaie qui menaçait d’entraver l’essor du Canada, et même de le livrer à ses voisins des États-Unis.

La colonisation avait surtout occupé les rives du Saint-Laurent, du lac Champlain, de la rivière Richelieu, et les terrains avoisinant les grands lacs.

La densité de la population devenait un danger. Un million de Canadiens resserrés dans une vallée d’une quinzaine de lieues de large commençaient à se trouver à l’étroit et la fièvre de l’émigration s’était emparée des vieux colons. Leurs enfants ne pouvaient plus se partager en les morcelant encore des fermes où leurs familles avaient autrefois vécu à l’aise. Ils songeaient à s’en aller dans le Sud où ils trouveraient un climat moins sévère et même une existence plus douce, en allant travailler dans les villes des États-Unis qui commençaient à prendre de prodigieux développements[1].

  1. On ne compte pas moins de 980.000 Canadiens dans les États-Unis.