champ, le hérisson ou sa femme disaient toujours : « Me voila ! »
A la soixante-quatorzième fois, le lièvre ne put achever. Au milieu des champs, il roula à terre ; le sang lui sortait par le cou, et il expira sur la place. Le hérisson prit le louis d’or qu’il avait gagné et la bouteille de brandevin ; il appela sa femme pour la faire sortir de son sillon ; tous deux rentrèrent très-contents chez eux, et, s’ils ne sont morts depuis, ils vivent encore.
C’est ainsi que le hérisson, dans la lande de Buxtehude[1], courut si bien qu’il fît mourir le lièvre à la peine, et depuis ce temps-là aucun lièvre ne s’est avisé de défier à la course un hérisson de Buxtehude.
La morale de cette histoire, c’est d’abord que nul, si important qu’il s’imagine être, ne doit s’aviser de rire aux dépens d’un plus petit, fût-ce un hérisson ; et, secondement, qu’il est bon, si vous songez à prendre une femme, de la prendre dans votre condition et toute semblable à vous. Si donc vous êtes hérisson, ayez bien soin que votre femme soit hérissonne, et de même pour toutes les espèces.
- ↑ Pays dont les habitants sont accusés d’être les Béotiens de l’Allemagne. (Note du traducteur.)