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songé à Dieu, mais uniquement à augmenter mes richesses. J’aurais possédé le monde entier, que je n’en aurais pas encore eu assez.»

Cette pensée l’effraya, et les genoux lui tremblaient si fort qu’il fat contraint de s’asseoir. En même temps on frappa à la porte. C’était un de ses voisins, un pauvre homme, chargé d’enfants qu’il ne pouvait phis nourrir. « Je sais bien, pensait-t-il, que mon voisin est encore plus dur qu’il n’est riche ; sans doute il me repoussera, mais mes enfants me demandent du pain, je vais essayer. »

Il dit au riche : « Vous n’aimez pas à donner, je ne l’ignore pas ; mais je m’adresse à vous en désespoir de cause, comme un homme qui va se noyer saisit toutes les branches : mes enfants ont faim, prêtez-moi quatre boisseaux de blé. »

Un rayon de pitié fondit pour la première fois les glaces de ce cœur avare : « Je ne t’en prêterai pas quatre boisseaux, répondit-il, je t’en donnerai huit, mais à une condition…

— Laquelle ? demanda le pauvre.

— C’est que tu passeras les trois premières nuits après ma mort à veiller sur ma tombe. »

La commission ne souriait guère au pauvre homme ; mais, dans le besoin où il était, il aurait consenti à tout. Il promit donc, et emporta le blé chez lui.