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RUE PRINCIPALE

— Batêche de batêche ! cria Mathieu en ressortant pour la troisième fois de la maison en flammes, qu’est-ce qu’ils font donc ces pompiers-là ?… On paie pourtant assez cher de taxes pour qu’ils viennent au moins voir ce qui se passe quand il y a un feu !

Et soudain, rapide, grondante, une rumeur courut de groupe en groupe :

— Madame Lamarche ! La pauvre madame Lamarche est en haut, dans sa chambre !

La paralytique !… Personne jusque-là n’y avait songé ; personne ne s’était dit que cette femme, qui n’était pas sortie de chez elle depuis dix-neuf ans, devait s’y trouver lorsque l’incendie avait commencé, et devait y être encore !

— Laissez passer les porteurs d’eau, là !…

— Faites donc la chaîne vous aussi, espèce de sans-cœur que vous êtes là !

— Voyons donc, sans dessein ! C’est sur le feu, pas sur mes culottes qu’il faut jeter ton eau !…

— Madame Lamarche ? se dit Marcel. Faut pourtant faire quelque chose !

Et il courut rejoindre Mathieu.

— Sais-tu où est sa chambre ? demanda le boucher.

— Là, tiens regarde !… La dernière fenêtre à gauche ; le feu ne m’a pas encore l’air d’être rendu là ! Faut y aller.

— Vous savez bien qu’il est trop tard à cette heure, dit quelqu’un. Personne n’est capable d’entrer là-dedans !

— Regardez, dit Girard. C’est ben sérieux, mais c’est une échelle ça, là-bas, le long de la clôture !

— Allez la chercher, dit Marcel, je vais monter, moi !

— Prenez garde, Marcel, dit monsieur Bernard qui venait enfin d’arriver. Pas d’imprudence !