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XXVI

où monsieur rené lamarre se trompe d’adresse

Le lendemain, lorsque Ninette arriva à l’Agora, Louis, qui tout en soupirant polissait les barres de cuivre de l’entrée, la prévint que monsieur Lamarre désirait la voir dès son arrivée.

Il n’y avait là rien de surprenant. Depuis qu’elle avait cessé de voir Bob et qu’elle avait consenti à sortir avec son chef direct de plus en plus fréquemment, René Lamarre ne manquait jamais une occasion d’inviter sa première caissière à le rejoindre dans son bureau. Au début, il avait cherché des prétextes, prétextes professionnels fallacieux et souvent bien puérils qui ne trompaient ni Cunégonde, ni même Louis et encore moins Ninette. Mais il s’était bientôt rendu compte du ridicule qu’il y avait à inventer d’inutiles discussions de service. Le personnel tout entier, sachant fort bien que monsieur le directeur trouvait la compagnie de sa caissière agréable après les heures de service, n’avait aucune raison de s’étonner qu’il la recherchât également pendant les heures de travail.

Ninette, ayant enlevé son chapeau, discipliné quelques boucles rebelles et poudré légèrement le bout de son nez, alla frapper à la porte du bureau directorial. Quoiqu’elle fût dix bonnes minutes en avance, René Lamarre la reçut comme s’il l’attendait depuis longtemps déjà.

— Ah ! tout de même, s’écria-t-il, vous voilà, ma petite Ninette !

— Tout de même ? s’étonna-t-elle.