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déjà chez lui cette espèce de „féminisme“, ce culte de la femme qui lui est commun avec les Lyonnais d’une époque postérieure. Cette qualité se manifeste surtout dans la Nef des Dames vertueuses (1503).

Lemaire des Belges était de ses amis ; il venait le voir, quand il visitait les imprimeurs qui s’occupaient de ses ouvrages. Lemaire ne perd jamais une occasion de chanter la belle ville hospitalière :

Le chef de la Gaule celtique,
Reflourissant comme un autre Ilion,
Et surcroissant en sa valeur antique[1].

Il l’appelle cité très noble et antique, le second œil de France et de tous temps élevée en grand prérogative[2]. Un de ses meilleurs amis lyonnais est le peintre et poète Jehan Perréal (appelé aussi Jehan de Paris)[3]. Ce Perréal avait été le principal architecte de l’église de Brou à Bourg-en-Bresse qui fut le mausolée des protecteurs de Lemaire. La ville de Lyon l’employait pour arranger les entrées solennelles et autres fêtes, et pour faire les décorations des mystères et autres pièces de théâtre.

Le meilleur ami de Perréal était Pierre Sala (mort après 1529) qui lui dédia le Livre de l’Amitié, un recueil de dictons sur l’amitié tirés des Pères d’Eglise et de quelques écrivains de l’antiquité[4]. Sala était issu d’une des familles les plus riches de Lyon ce qui lui permit de se livrer exclusivement aux études littéraires. Vers 1490 il s’installa dans une maison de campagne sur la montagne de Fourvière, appelée l’Anticaille, au milieu des ruines de l’antique Lugdunum. Il y mena la vie d’un riche amateur. Les amis de Symphorien Champier se retrouvaient souvent dans des réunions qui n’avaient rien d’officiel. La lettre qui nous en a transmis la notice a donné lieu à la célèbre légende de l’Académie de Fourvière à laquelle ont encore ajouté foi Sainte-Beuve, Thibaut et P. Steyert, le dernier historiographe de Lyon[5]. Elle

  1. Concil de deux lang. p. 382.
  2. Illustre des Gaules p. 36. cf. sur Lemaire des Belges : Thibaut, op. cit. et Becker, Ph. Aug. Jean Lemaire. Strassburg 1893.
  3. Charvet, M, Jehan Perrial. Lyon 1874. — Dufay. de Perréal. Revue du Lyonnais. 1870. I. p. 50.
  4. Sala, Pierre. Le livre d’amitié dédié à Jehan de Paris par l’escuyer P. Sala, Lyonnais, p. p. G. Guigne, Lyon 1884 (ms. de la Bibl. nat.)
  5. L’auteur de la légende est le jésuite Poullin de Lumina qui se permet dans son Abrégé chronologique de l’histoire de Lyon (Lyon 1767) la fantaisie suivante, amusante surtout au point de vue chronologique : Louise l’Abé étoit un des principaux membres de l’Académie littéraire dont les assemblées se tenaient sur la montagne de Fourvière, dans la maison du Sieur de Langes d’où elle fut appelée l’Angélique ; les autres Académiciens étaient les Sieurs de Langes, de Villeneuve, Fournier, Paterin, Symphorien Champier, Benoît Court, Jean voulté (sic) Jean Dolet (sic), Duchoul, Vanzelles, le poète Girinet, Clément Marot, Maurice Sève, Claudine et Sibile Sève, Pernette Duguillet, Clémence de Bourges et les Sieurs du Peyrat.