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de Curte (Curtius) étaient fréquentés par beaucoup de Français, peut-être à Padoue où Longueil et Simon de Villeneuve attiraient justement à cette époque la jeunesse studieuse de France[1]. Issu d’une famille riche et studieuse, ayant grandi dans un milieu qui l’attirait vers l’humanisme et les beaux-arts dont la seule patrie était alors l’Italie, comment eût-il négligé de visiter les universités de ce pays ?

Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il fit, en 1533, des études d’archéologie et de littérature à Avignon, en société d’amis italiens. Il se plaisait alors à suivre les traces de Pétrarque dont il connaissait les poésies depuis sa première jeunesse, et qu’il révéra comme son maître pendant toute sa vie.

À cette époque[2] se passe l’événement qui nous donne la première notice directe de la vie de Maurice Scève et qui fait connaître le nom du jeune poète hors des limites de sa patrie. C’est l’histoire tant de fois répétée et discutée de la découverte du tombeau de la célèbre amie de Pétrarque, de Laure de Noves[3]. Jean de Tournes la raconte dans l’épître dédicatoire de son édition des sonnets de Pétrarque de 1545, épître adressée à Maurice Scève lui-même et qui rapporte les faits tels que le poète a dû les communiquer à l’éditeur[4].

Voici ce qui nous paraît en ressortir. Dans ses recherches sur Pétrarque, Scève s’occupait aussi de la question de l’origine de Laure, comme quelques années avant lui le commentateur Velutello qui nous assure qu’une tradition fort répandue dans Avignon rattachait la maîtresse de Pétrarque à la noble famille de Sade. Il n’y avait donc rien d’étrange à ce que Scève poussât ses recherches dans la Chapelle de la Sainte-Croix de l’église des frères-mineurs d’Avignon, où étaient les tombeaux des de Sade, pour trouver quelque vestige qui le conduisît sur le chemin cherché avec tant d’ardeur. Tantôt il était seul, et tantôt Gerolamo Manelli, gentilhomme florentin, et messer Buontempo, grand-vicaire du cardinal de Médicis et archevêque d’Avignon l’assistaient dans ses travaux.

  1. Christie. Richard Copley. Étienne Dolet. London 1880. chapitre II : Padua.
  2. C’était dans les premiers jours de 1533. La réponse de Bembo à une lettre de Barthélémy Castellano, Diacre à Avignon qui lui a demandé son opinion sur l’authenticité du sonnet trouvé dans le tombeau de Laure, est datée du 24 avril 1533.
  3. de Sade. Mémoires pour la vie de François Pétrarque. 3 vol. Amsterdam 1764— 1767 (A. I notes à la fin du volume p. 13 ; t. III pièces justificatives p. 38). — Bartoli, Stor. lett. vol. VII. — Körting. Petrarcas Leben und Werke. Leipzig 1878 Francesco d’Ovidio. Madonna Laura. Nuova Antologia, Luglio 1888, p. 209. —
  4. Cette épître est reproduite avec quelques mots de plus dans les éditions de Jean de Tournes de 1547 et 1550. Elle se trouve un peu abrégée dans les éditions de G. de Roville de 1564 et 1574-