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ARCHILOCHUS.

certaine maison, pour y apaiser les mânes d’Archilochus [a]. Cependant ce meurtre avait été fait de bonne guerre (I). C’est dans les vers iambiques que ce poëte a excellé : il en était l’inventeur (K), et l’un des trois poëtes qu’Aristarque avait approuvés en ce genre de poésie [b]. Quintilien le met à certains égards au-dessus des deux autres. Le grammairien Aristophane trouvait que plus les poëmes ïambiques d’Archilochus étaient longs, plus ils étaient beaux (L). L’hymne qu’il fit sur Hercule et sur Iolaüs, eut cet avantage, qu’on avait accoutumé de la chanter trois fois en l’honneur de ceux qui remportaient la victoire aux jeux olympiques [c]. Il ne s’est presque rien conservé de ses ouvrages ; ce qui est plutôt un gain qu’une perte, par rapport aux bonnes mœurs (M). Ceux qui parlent de plusieurs Archilochus multiplient les êtres sans nécessité (N). Si nous avions le dialogue composé par Héraclide sur la Vie de notre poëte [d] nous en apprendrions apparemment bien des particularités, et sans doute nous y trouverions comment il mena en l’île de Thasus une colonie de Pariens [e]. Il y avait de l’honneur à être choisi pour un tel emploi.

  1. Voyez l’article Tettix.
  2. Voyez la remarque (K).
  3. Pindar. Olymp. od. IX, et ibi Jo. Benedictus. Voyez aussi dans les Chiliades d’Erasme, Archilochi melos.
  4. Diogen. Laërt. in Heraclid.
  5. Œnumaüs, apud Euseb. Præpar. Evang., lib. VI, cap. VII. Vide etiam Perizon. in Æliani lib. X, cap. XIII.

(A) Il était fils de Télésiclès. ] C’est ce que l’on trouve non-seulement dans Suidas, mais aussi dans Œnomaüs ; cité par Eusèbe [1].

(B) Il a fleuri dans l’olympiade 29. ] Les auteurs varient un peu là-dessus. Tatien et saint Cyrille ont placé Archilochus sous la 23e. olympiade [2]. Clément Alexandrin l’a placé sous la 20e. ; un autre sous la 15e., sous la 18e. et sous la 19e. [3]. Cicéron l’a fait vivre durant le règne de Romulus [4]. Cornélius Népos le place au temps de Tullus Hostilius [5]. Hérodote veut non-seulement qu’il ait fait des vers sur l’aventure de Gygès et de Candaule ; mais aussi qu’il ait vécu en ce temps-là [6]. Eusèbe le fait fleurir dans la 29e. olympiade. Il est facile d’accorder entre eux quelques-uns de ces auteurs : mais on ne saurait les mettre d’accord tous ensemble ; car la révolution qui se fit dans la Lydie, par la mort de Candaule, et par l’installation de Gygès, tombe sous la 17e. olympiade [7]. La mort de Romulus est une affaire de l’olympiade précédente. Le règne de Tullus Hostilius est enfermé entre la première année de la 25e. olympiade, et la première année de la 35e. M. de Saumaise, fort heureux à relever une grosse bévue de Solin, n’a pas évité de se méprendre de son chef. Solin a été assez étourdi pour mettre dans un même siècle les trois orateurs de la famille des Curions, Archilochus et Sophocle : Plurimi, dit-il [8], inter Romanos eloquentiâ floruerunt, sed hoc bonum hereditarium nunquàm fuit nisi in familiâ Curionum, in quâ tres serie continuâ oratores fuêre : magnum hoc habitum est sanè eo sæculo quo facundiam præcipuè et humana et divina mirata sunt : quippè tunc percussores Archilochi poëtæ Apollo prodidit, et latronum facinus deo coarguente detectum ; cùmque Lysander Lacedæmonius Athenas

  1. Euseb., lib. VI, cap. VII, Præparat. Evangel., pag. 256 : item, lib. V, c. XXXIII, pag. 227.
  2. Voyez Vossius, de Poët. Græcis, pag. 14.
  3. Anonymus in Descript. Olymp., apud Vossium, de Poët. Græcis, pag. 14.
  4. Cicero, Tusculan, I, cap. I.
  5. Cornel. Nepos, apud Gellium, lib. XVII, cap. XXI.
  6. Herod., lib. I, cap. XIII.
  7. Voyez Sethus Calvisius, ad ann. Mundi 3239, pag. 65.
  8. Solinus, cap. II, sub fin.