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BONFADIUS.

nobis est visus nec amico nostro, quem vix tamen ulli rarissimi fugiunt[1]. Gassendi fait là une lourde faute. Bonciarius a toute sa vie enseigné à Pérouse. Il était donc Perusinus Professor : de Perusinus on a fait facilement Parisinus ; et de Parisinus, encore plus facilement Parisiensis. Qu’on aille dire, après cela, que les fautes d’impression ne sont pas de conséquence par rapport aux habiles gens.

  1. Gassendus, de Vitâ et Moribus Epicuri, lib. VII, cap. VII, pag. 224.

BONFADIUS (Jacques) ; l’un des plus polis écrivains du XVIe. siècle, était né en Italie, proche le lac de Garde (A). Il fut secrétaire du cardinal de Bari, à Rome, pendant trois ans, après quoi, ayant perdu tout le fruit de ses services par la mort de son maître, il entra chez le cardinal Ghinucci, et lui servit de secrétaire, jusques à ce qu’une longue maladie le tira de cet emploi. Lorsqu’il fut guéri, il se trouva si dégoûté de la cour, qu’il résolut de chercher fortune par une autre voie. Il ne trouva rien dans le royaume de Naples, où il erra assez longtemps : il alla ensuite à Padoue, et puis à Gênes, où il fit des leçons publiques sur la Politique d’Aristote. On le chargea d’en faire aussi sur la Rhétorique ; et comme il y réussissait bien il eut un grand nombre de disciples qui allaient apprendre chez lui les belles-lettres. Sa réputation s’augmenta de jour en jour, de sorte que la république de Gênes le fit son historiographe, et lui assigna pour cette charge une fort bonne pension. Il s’appliqua de toutes ses forces à la composition des annales de cet état-là, et en mit au jour les cinq premiers livres[* 1]. Il y parla trop librement et trop satiriquement de quelques familles ; et par-là il se fit des ennemis qui résolurent sa perte. Ils le firent accuser de pécher contre nature ; et comme il se trouva des témoins pour l’en convaincre, il fut condamné à être brûlé[a] (B). Quelques auteurs disent que la sentence fut exécutée selon sa forme et teneur ; mais d’autres assurent que les sollicitations de ses amis firent commuer la peine, et qu’il fut décapité (C). Ceci arriva l’an 1560[* 2][b]. Ceux qui blâment son imprudence n’ont pas tort, et se sont mal trouvés de l’avoir copiée (D). On a de lui quelques harangues ; quelques lettres, et des poésies latines et italiennes[* 3]. Il écrivit un billet à Jean-Baptista Grimaldi le jour de l’exécution, afin de témoigner sa reconnaissance aux personnes qui avaient tâché de

  1. * Les annales Gennenses sont, comme le dit Joly, réimprimées dans le tome Ier. du Thesaurus antiquitatum et historiarum Italiæ, de Grævius.
  2. * Leclerc blâme Bayle d’avoir adopté cette date de 1560 de préférence à celle de 1551 donnée par le Ghilini qu’il cite à la note (b), il dit à l’appui, que la lettre écrite par Bonfadius, peu avant son supplice, est imprimée dans un recueil de lettres qui parut à Venise chez Giolito de’ Ferrari en 1559.
  3. * Joly, dans ses additions, note que le Journal des Savans annonce récemment un nouveau recueil d’ouvrages de Bonfadius : il lui donne la date de 1744, et le titre de Lettere famigliari di Jacopo Bonfadio, etc. Ginguené, qui date l’ouvrage, de 1746, ajoute : « 43 lettres familières, une traduction italienne du discours de Cicéron pro Milone, et un petit nombre de vers italiens et latins composent ce petit volume ; mais il a un mérite qui manque à la plupart des gros recueils ; il ne renferme rien que d’exquis »
  1. Tiré du Ghilini, Teatro d’Huomini illustri, tom. I, pag. 70.
  2. Thuan., lib. XXVI, pag. 528. Mais le Ghilini, tom. I, pag. 70, met la mort de Bonfadio à l’an 1551.