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DASSOUCI.

son congé ou son établissement [a], il obtint à son grand regret la première de ces deux choses [b]. Je ne puis donner la suite de ses aventures, je n’ai eu en main que les trois premières parties de l’histoire qu’il en a faite. Je me souviens qu’environ l’an 1674 il publia deux petits volumes [* 1] qu’il avait composés dans les prisons du Châtelet de Paris ; il y était détenu encore, et je ne sais point les particularités de son élargissement [* 2]. On n’a pas besoin de consulter les satires de ses ennemis, pour former de lui une très-mauvaise opinion. Ce qu’il avoue, ce qu’il raconte lui-même, suffit pour cela. Je ne sais si, présentement [c], on pourrait obtenir un privilége à Paris pour faire imprimer un ouvrage semblable aux relations de notre poëte burlesque ; car elles sont parsemées de profanations. Et notez qu’entre autres crimes on l’accusa d’impiété : cependant il se glorifie d’avoir pris la plume pour la défense [* 3] de l’église romaine (F). Il se plaint de M. Boileau, qui n’avait pourtant rien dit que ce qu’il fallait contre le burlesque (G). L’endroit où il parle de quatre poëtes fous [d] est divertissant : je n’en copierai que ce qui concerne celui qu’il nomme, et qui est auteur imprimé (H). Il eut entre autres ennemis Cyrano de Bergerac [e], et Loret. Celui-ci le maltraita en toute occasion dans sa gazette burlesque, et fut si prompt à débiter les nouvelles désavantageuses à d’Assouci (I), qu’il publia plusieurs fois sa mort, et toujours très-faussement [* 4].

  1. * Joly rapporte que le 1er. de ces volumes est intitulé, La Prison de M. d’Assouci, dédiée au roi, 1674, in-12 de 180 pages, sans l’épître dédicatoire ; le second, Les Pensées de M. d’Assouci, dans le saint office de Rome, dédiées à la reine, 1676, in-12, de 200 pages, outre l’épître dédicatoire et un avertissement Au pieux lecteur. Ces deux volumes sont de l’imprimerie d’Antoine Rafflé.
  2. * D’Assouci en rapporte quelques-unes dans son volume intitulé : La Prison, etc. Joly en a transcrit un long passage.
  3. * C’est, dit Leduchat, dans les Pensées, etc., dédiées à la reine, déja mentionnées dans la note *1 ci-dessus,
  4. * Joly prétend que Bayle cite les Aventures d’Italie, tantôt sous le titre de 3e. tome des Relations, tantôt sous son véritable titre d’Aventures d’Italie. C’est toujours sous ce dernier titre que Bayle les a citées, du moins dans cet article.
  1. D’Assouci, Aventures d’Italie, pag. 338.
  2. Là même, pag. 342.
  3. On écrit ceci en octobre 1699.
  4. D’Assouci, Aventures d’Italie, pag. 273 et suiv.
  5. Les pièces contre Soucidas, qui se trouvent dans ses Œuvres, sont contre d’Assouci.

(A) Sa mère était..... fort petite et fort bilieuse, et il y eut..... peu de concorde entre son mari et elle. ] On va voir un exemple des déréglemens de plume à quoi s’exposent ceux qui s’érigent en plaisans et en écrivains burlesques. Ils se trouvent engagés à divertir le public à leurs dépens, et à bouffonner contre eux-mêmes, et contre ce qu’ils devraient le plus épargner. Voici comment notre d’Assouci parle de sa mère : « C’était un petit bout d’amazone prompte et colère, qui, pour réparer les défauts de sa petite taille, portait des patins si hauts, que qui en aurait fendu le liége en aurait fait aisément de forts beaux cotrets de l’école ; si bien qu’elle ne se déchaussait jamais sans perdre justement la moitié de son illustre personne. C’est pourquoi mon père, qui n’était pas tant spirituel qu’il ne fût encore attaché à la matière, disait que ma mère était si petite qu’elle se perdait dans le lit, et, ne la trouvant point dans les draps. se plaignait qu’elle n’avait point de corps, et qu’elle était tout esprit. Mais en récompense, outre la qua-