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HOTMAN.

XI[1], et se maria avantageusement à Paris. Jean Hotman, son fils aîné, fut si riche, qu’il fit compter de très-grosses sommes pour la rançon de François Ier.[2]. Pierre Hotman, le dernier des dix-huit enfans de Lambert ; fut maître des eaux et forêts, et puis conseiller au parlement de Paris. Notre François Hotman fut son fils aîné[3]. Le Supplément de Moréri porte que Henri Hotman, né à Clèves l’an 1466, fut le premier de ce nom qui vint en France, et qu’il y vint à la suite d’Engilbert, duc de Clèves, qui fut le premier duc de Nevers.

(B) Ce fut le second ouvrage qu’il mit sous la presse. ] Car il avait déjà publié un petit livre de Gradibus cognationis, qui fut fort estimé. Penè puer libellum de gradibus cognationis adjuncto diagrammate publicavit à doctissimis viris in pretio habitum, et mox à quodam haud ignobili jurisconsulto probatum, ita ut eum suis in Institutiones commentariis vehementer commendatum insereret[4]. Le second ouvrage fut un commentaire ad titulum Institutionum de actionibus. La beauté du style, et la connaissance de l’antiquité romaine qui éclataient dans cet écrit, le firent fort estimer[5]. M. Teissier[6] ne devait pas appliquer ce bel éloge au petit livre des Degrés de parenté. S’il avait consulté avec un peu plus d’attention l’ouvrage qu’il cite[7], il n’aurait pas pris l’un pour l’autre.

La Croix du Maine vous apprendra que la traduction française, que fit Hotman de l’Apologie de Socrate, composée par Platon, fut imprimée l’an 1549, à Lyon, chez Sébastien Gryphius, in-8o.

(C) Il s’en alla à Lausanne. ] M. Teissier rapporte que François Hotman en sortant de France se retira à Genève, et vécut quelque temps dans la maison de Calvin[8]. Je crois qu’il a raison, encore que la vie d’Hotman, qu’il cite, ne parle point de cela. Il semble que Nevelet ait supprimé une chose qu’il ne devait pas omettre. Il n’est pas trop apparent que MM. de Berne aient offert une chaire de professeur aux belles-lettres dans l’académie de Lausanne à un jeune homme de vingt-trois ans qui demeurait à Lyon. Mais il est probable qu’ils l’ont offerte à ce jeune homme, si l’on suppose qu’il demeurait à Genève, et qu’il s’y était fait aimer de Calvin. Voilà des défauts d’exactitude qui se trouvent dans les meilleurs livres, parce que, pour l’ordinaire, les bons auteurs sont ceux qui se piquent de serrer une narration. Ils ne prennent pas toujours garde qu’à force de la serrer ils, l’étranglent. Brevis esse laboro, obscurus fio[9]. C’est ce qui pourrait être arrivé ici à Nevelet : ou bien disons que, n’ayant pas vu dans les mémoires qu’on lui donna le voyage de Lyon à Genève, il a cru que François Hotman ne quitta Lyon que pour aller professer les belles-lettres à Lausanne[10]. Mais ne décidons point en faveur de ce qui est le plus vraisemblable ; car comme il y avait déjà à Lausanne plusieurs illustres réfugiés qui connaissaient et qui aimaient le mérite et la piété de François Hotman[11], ils purent aisément obtenir de MM. de Berne qu’on lui adressât une vocation à Lyon. M. Teissier remarque que ce fut par l’entremise de Théodore de Bèze, que la ville de Lausanne offrit à Hotman la charge de professeur en humanité. Je crois qu’il se trompe, et qu’il eût mieux valu faire intervenir Calvin : car Hotman était professeur à Lausanne avant que Théodore de Bèze y allât professer la langue grecque[12] ; et il est cer-

  1. C’est ainsi que je corrige la faute Ludovici VI, qui est dans la Vie de François Hotman, à l’édition de Leipsic, 1686, et à celle d’Amsterdam, 1700.
  2. Redimendo Francisco regi ad Ticinum capto, ingentem pecuniæ vim solus fide suà curaverit summo Galliæ bono, summâ suâ cum laude. Petrus Neveletus Doschius, in Vitâ Fr. Hottomanni, pag. m. 208.
  3. Idem, ibidem.
  4. Idem, p. 210.
  5. Jurisconsultis etiam magnis gratum ob latini sermonis elegantiam, et Rom. antiquitatis exquisitam scientiam. Idem, ibid.
  6. Additions aux Éloges, tom. II, pag. 115.
  7. La Vîe d‘Hotman par Nevelet.
  8. Additions aux Éloges, tom. II, p. 115.
  9. Horat., de Arte poët., vs. 25, 26.
  10. In urbem equestrium… ad humaniorum quæ dicuntur litterarum professionem honorificè à senatu Bernensis reipub. evocatus, cujus in ditione urbs illa se contulit. Neveletus, in Vitâ Hottomanni, pag. 211.
  11. Idem, ibidem.
  12. Erant Lausannæ tunc temporis doctrinâ et pietate viri insignes Petrus Viretus ecclesiæ pastor… Franciscus Hottomannus eloquentiæ professor. In Vitâ Theodori Bezæ, apud Melchior. Adam., pag. 205.