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MUSCULUS.

nons leur malignité, copions le latin de l’original. Quibus autem rationibus, cùm ipse (Musculus) tùm alii multi boni viri, impulsi sint ; ut, cùm in hâc causâ crassam quorundam sententiam minimè amplecterentur, in hanc tamen concordiam consentirent, deque suâ, quâ hactenùs, docuerant, perspicuitate nonnihil decederent, prudentes viri facilè intelligunt. Nimirùm quòd persuasum hoc illis esset, facturos se id summo cum ecclesiæ et reipublicæ bono. Sic enim solum gravem et malè consultam illam de hâc causâ controversiam tolli, ecclesiis diù desideratam pacem restitui, et respublica etiam firmiùs conjungi et consociari posse. Postquàm verò, rerum eventu edocti, his quasi fucis verborum pertinacioribus non satis fieri, simpliciores verò in errorem abduci, seque apud omnes bonos in suspicionem mutatæ sententiæ venire cernerent, ad pristinam suam perspicuitatem reversi, et palàm quid sentirent, professi sunt [1]. Ceux qui disent, avec des airs de déclamateur, qu’il faudrait vider les controverses par des formulaires vagues, équivoques et embarrassés, où chaque parti trouvât son compte, pourraient-ils bien indiquer beaucoup de traités de paix de religion conclus de cette manière ? N’avait-on pas fait à Wittemberg ce qu’ils croient si utile [2] ? On vient de voir que le fruit de tout cela ne dura guère.

Musculus fut député du sénat d’Ausbourg, pour assister aux conférences qui se tinrent entre les théologiens protestans et les théologiens catholiques pendant la diète de Worms, et pendant celle de Ratisbonne, l’an 1540 et l’an 1541. Il fut l’un des secrétaires de la conférence de Ratisbonne entre Mélanchthon et Eccius, et il en dressa les actes [3]. Les habitans de Donavert, ayant embrassé la réformation, l’an 1544, prièrent ceux d’Ausbourg de leur envoyer un théologien qui dressât chez eux une église, et qui jetât les fondemens de la vraie foi. Musculus fut choisi pour cette fonction, et fit sa première prédication, le 28 de décembre, à ces nouveaux convertis, et leur annonça la parole chaque jour trois mois de suite [4].

(H) Il se rendit habile dans la langue grecque et dans l’hébreu, quoiqu’il eût commencé bien tard à les étudier. ] Il commença à étudier l’hébreu lorsqu’il fut ministre à Strasbourg : il avait bien trente-deux ou trente-trois ans. On assure qu’il s’avança beaucoup et fort vite dans l’intelligence de cette langue. Tantam brevi ejus linguæ cognitionem sibi comparavit, ut non sacra solùm Biblia, sed et rabbinorum obscurissimos commentarios, et Chaldaicos etiam interpretes, perfecte intelligeret [5]. On ajoute [6] que pendant qu’il fut ministre à Augsbourg, il apprit assez bien l’arabe sans l’aide d’aucun maître. Il avait quarante ans lorsqu’il commença d’étudier la langue grecque : Xystus Bétuléius, premier régent dans le collége d’Augsbourg, lui en enseigna les premières règles [7]. On doit admirer que Musculus, s’étant avisé si tard d’étudier le grec, en ait acquis tant de connaissance.

(I) Nous rapporterons quelques jugemens que l’on fait de ses écrits. ] M. Huet loue à certains égards ses traductions, mais il ne le trouve pas assez docte ni en grec ni en latin. Wolfgangus Musculus, vir bonus, sed græcæ linguæ notitiâ imparatus, neque latinâ valdè instructus, brevitate et nitore, simplicitate etiam ac fide commendatur : nam et ea quæ intelligebat, et ea quæ non intelligebat, uti poterat, expressit : nihil videas illum studio prætermittere, nihil alienum substituere [* 1] : cæteroquin hallucinatur sæpè, utpote earum artium rudis, quas qui colunt, eruditi appellantur [8]. Vous ferez bien de consulter tout le passage de Casaubon que M. Huet indique, vous y trouverez un parallèle entre Pérot et Musculus, par rapport à leur traduction de Polybe. Voyons ce que l’on a dit d’une autre version de ce

  1. (*) Casaub. Præfat. ad Polyb.
  1. Idem, ibidem, pag. 379.
  2. Conférez ce que dessus, remarque (B) de l’article Bucer, tom. IV, pag. 202.
  3. Melch. Adam, in Vitis Theol. german., pag. 379, 380.
  4. Idem, ibidem.
  5. Idem, ibidem, pag. 376.
  6. Idem, ibidem, pag. 378.
  7. Melch. Adam, in Vitus Theol. german., pag. 378.
  8. Huet., de claris Interpretibus, p. m. 225.