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PERGAME.

adorare et venerari flexis genibus et muliebri superstitione, quod Prusias facere solebat, atque interim eâdem famâ labefactare, eorumque eversione contumeliam diis facere, quis neget id esse rabie perciti hominisque de statu mentis deturbati[1] ? Je suis sûr que Polybe aurait parlé moins durement de ceux qui auraient pillé les temples sans en avoir jamais invoqué les divinités. Ce qu’il dit, que Prusias entra dans Pergame, est compatible avec ce que Diodore de Sicile raconte, que ce prince n’espérant plus de se rendre maître de la personne d’Attale, se mit à piller le temple de Nicéphore, qui n’était pas loin de la ville[2]. Mais voici quelque chose de plus fort contre Polybe, me dira-t-on. Le roi Eumènes, dans la harangue qu’il fit au sénat de Rome, déclare formellement qu’il fut assiégé dans Pergame, et qu’il eut le bonheur d’empêcher que la ville ne fût prise. Quod miserrimum est in bello, obsidionem passus sum, Pergami inclusus cum discrimine ultimo simul vitæ regnique, liberatus deindè obsidione, cum aliâ parte Antiochus, aliâ Seleucus circà arcem regni mei castra haberent, relictis rebus meis totâ classe ad Hellespontum L. Scipioni Cos. vestro occurri, ut eum in trajiciendo exercitum adjuvarem[3]. Je réponds que ni Polybe ni Diodore de Sicile ne parlent point de ce qui fut fait sous le roi Eumènes. Ils parlent d’un siége de Pergame postérieur à ce temps-là, et soutenu par Attale Philadelphe, contre Prusias roi de Bithynie. Voyez Appien[4].

  1. Polybius, in Excerptis à Valesio editis, pag. 169.
  2. Diodorus Siculus, in Excerptis à Valesio publicatis, pag. 336. Il remarque que Prusias en enleva tous les dieux, et nommément Esculape.
  3. T. Livius, lib. XXXVIII, cap. LIII.
  4. Appianus, in Mithridat., circa init.

PERGAME (Attale, roi de), succéda, l’an 512 de Rome, à Eumènes, son cousin (A), qui avait été le successeur de Philétære leur oncle. Il se donna le titre de roi, qu’ils n’avaient point pris (B), et il crut le pouvoir faire sans arrogance après la gloire qu’il avait acquise en gagnant une bataille contre les Gaulois [a]. Il fit alliance avec les Romains [b] dans un temps où un tel ami leur était fort nécessaire ; car, outre qu’ils avaient à repousser Annibal dans l’Italie, il fallait qu’ils tinssent tête à Philippe, roi de Macédoine, qui s’était déclaré leur ennemi. Attale prit le parti des Romains avec beaucoup de chaleur, et fut attaché à leurs intérêts tout le reste de sa vie. Il fit un voyage à Athènes pour nuire au roi de Macédoine. Les Athéniens lui firent de grands honneurs (C). Il fit un autre voyage en Grèce à l’âge de plus de soixante et dix ans, afin de procurer des alliés aux Romains contre le roi de Macédoine[c]. Il harangua les Thébains avec tant de force (D), afin de les engager dans cette ligue, que son ardeur, un peu trop grande pour un vieillard, lui causa, ou un vertige, ou une fluxion, qui ne lui permit pas de continuer sa harangue. Il tomba évanoui au milieu de son discours ; et, s’étant embarqué peu de jours après, il s’en retourna à Pergame, où il mourut[d] en peu de temps, après un règne de quarante-quatre années[e]. Il vécut soixante et douze années[f]. Ce fut un prince qui aima les philosophes [g], et qui se servit de ses ri-

  1. Voyez la rem. (B).
  2. L’an 542. Voyez Tite Live, lib. XXVI, pag. m. 451.
  3. Tite Live, lib. XXXIII, pag. 610.
  4. L’an 556 de Rome.
  5. Tite Live, lib. XXXIII, pag. 610. Polybius in Excerptis Valesianis, pag. 103.
  6. Polyb., ibidem.
  7. Voyez l’article Lacyde, tom. IX, pag. 7.