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DISSERTATION

Dieu affirme qu’il ne faut point rendre faux temoignage contre qui que ce soit, comme fait celui-ci contre M. de Beze, és escrits duquel il ne se trouve un seul mot du conseil de tuer les tyrans, etc. Après quelques citations, l’auteur continue ainsi : Voilà des paroles de M. de Beze, qui dementent assez le jesuite, l’affirmant estre l’auteur de ce Traité qu’il produit sous le nom de Junius Brutus, qui n’a nulle conformité avec celui de Theodore de Beze, et qui est en apparence le vrai nom de l’auteur, veu qu’il y a plusieurs hommes doctes portans le surnom de Junius. Un jésuite irlandais [a] cita comme un livre de Théodore de Bèze celui de Junius Brutus, l’an 1614. Je ne doute pas que bien d’autres, et avant et après les réponses à l’Anti-Coton, n’aient employé cette calomnie contre Théodore de Bèze [* 1], et je m’attends qu’au premier jour on me rendra ce que j’ai prêté à M. Placcius ; je veux dire qu’on me fera voir que je pouvais remonter encore plus haut : d’où il paraîtra de plus en plus combien il faut être réservé sur les affirmations générales, lors même qu’on a la vaste lecture du célèbre professeur d’Utrecht ; car enfin cette grande connaissance qu’il avait de toutes sortes de livres ne l’’empêcha pas d’ignorer, 1°. qu’avant l’année 1660 Bèze avait été accusé plusieurs fois d’avoir composé le livre de Junius Brutus ; 2°. que deux ans avant qu’on fit l’oraison funèbre de Simon Goulart, le public avait su de d’Aubigné que Hubert Languet avait pris ce masque ; 3°. que Grotius avait publiquement désigné M. du Plessis Mornai pour l’auteur de cet écrit.

XI. Apologie des Protestans pour l’Église romaine, par Brereley,

En attendant le retour du prêt, je dirai ici qu’un prêtre anglais, nommé Jean Brereley, cite dans son Apologie des Catholiques par les Protestans [b], un auteur nommé Sutcliffus [c], qui avait dit que les Vindiciæ contra Tyrannos étaient un livre composé ou par Théodore de Bèze ou par Hotman. Quoique je n’aie pu découvrir en quel temps cette Apologie fut imprimée pour la première fois [* 2], je ne saurais douter que ce n’ait été avant les réponses des jésuites à l’Anti-Coton, puisque j’apprends du traducteur que dès qu’elle eut paru en anglais, Bancroft, qui était alors archevêque de Cantorbéry, chargea quelques savans théologiens, et nommément Morton, d’y répondre, et que la

  1. * Leclerc cite encore, comme étant de cette opinion, 1°. Baricave, docteur en théologie (dans la Défense de la Monarchie française, etc., Toulouse, 1614, in-4o.) ; 2°. Gabriel Martin, libraire (dans sa Bibliotheca Fayana) ; 3°. et Jean Fabricius, (Historia Bibl. Fabricianæ, tom. III, pag. 155.)
  2. * Ce fut certainement en 1608, dit Leclerc.
  1. Henricus Fitz-Simon, in Britannomachiâ Ministrorum, imprimés à Douai, l’an 1614.
  2. Page 636 de la traduction en latin faite sur l’anglais, par Guillaume Raynérius, et imprimée à Paris en 1615, in-4o. L’auteur y est appelé Brerléius, mais dans de Catalogue d’Oxford Brereley.
  3. C’est celui que nous nommons en latin Mathæus Sutlivius (Raynérius le devait ainsi nommer) ; il était bon protestant, mais fort opposé aux presbytériens. J’ai donné son article, tom. XIII, pag. 571.