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ZANCHIUS.

rien à son auteur ni à l’ouvrage de la paix. Sed ne sic quidem benè coiit gratia : cùm statim pòst adversarii victoriâ jactitare, triumphare, et laureatas in Saxoniam, atque alias regiones litteras missitare [1].

J’avais écrit tout ce que dessus avant que je m’avisasse de consulter l’Histoire sacramentaire d’Hospinien. Je l’ai enfin consultée, et j’y ai trouvé une longue narration de cette dispute. J’y ai vu [2] qu’un des bons amis de Zanchius rompit avec lui, et se prévalut d’une lettre qu’il lui avait communiquée. J’y ai vu [3] que Marbachius et ses adhérens cessèrent de lui parler, et de lui tirer le chapeau, depuis la disgrâce du livre d’Héshusius. Mais ce qui m’importe le plus pour la sûreté de mes conjectures, j’y ai vu que Zanchius donna dans son âme un sens tout particulier aux termes de sa souscription. Voici quelle était sa réservation mentale : Manc doctrinæ formulam recipio quatenùs illam piam esse judico [4]. Ses adversaires, envoyant partout des copies de ce qu’il avait signé, ne faisaient aucune mention des termes de sa signature [5] : c’est qu’ils craignirent que leur triomphe ne parût pas assez grand à ceux qui pourraient peser les mots équivoques de Zanchius.

Si l’on s’en rapporte à une lettre qu’il écrivit à David Chaillet, le 1er. de novembre 1563 [6], ils se servirent de beaucoup de fraudes. C’est une lettre qui mérite d’être lue ; il y fait son apologie, et s’efforce de prouver qu’il n’a rien fait contre sa conscience.

(D) Selon M. de Thou, il laissa bien des enfans. ] Voici ses paroles : Scripsit multa..... quorum partem, filii vixit, in lucem dedit, partem filii, quos plureis reliquit, post mortem ejus publicârunt [7]. Il y a là un peu d’hyperbole, car l’épître dédicatoire des lettres de Zanchius, signée par ses héritiers, ne contient que le nom de ses deux fils, avec celui de son gendre. Rapportons ce que l’on trouve concernant ses mariages. Il épousa en premières noces une fille de Cœlius Sécundus Curien, de laquelle il eut une fille qui ne vécut pas long-temps. Il se maria ensuite avec la sœur d’un gentilhomme nommé Laurent Lumage. Les deux jumeaux dont elle accoucha l’année des noces moururent bientôt après. La fille qui vint au monde l’année suivante mourut à trois ans. Voilà ce que Jérôme Zanchius écrivit à Lélius Zanchius, le 2 d’avril 1565 [8]. Il lui marque qu’il avait alors deux filles.

(E) On peut censurer M. de Thou en quelque chose. ] I. Martyr quitta l’Italie l’an 1542. Zanchius fit la même chose l’an 1550. Ainsi ces paroles de M. de Thou ne sont point exactes : Hieronymus Zanchius….. paulò post Petri Martyris..... discessum ob eandem causam Argentinam concessit [9]. II. Elles sont fautives d’un autre côté ; car Zanchius n’alla à Strasbourg qu’après avoir séjourné environ neuf mois dans le pays des Grisons, et autant de temps à Genève [10]. III. Vermilio in Angliam evocato anno 54 in munere successit. Ce latin peut signifier que Pierre Martyr s’en alla en Angleterre l’an 1554 ; mais cela est faux : il y alla en 1547. Ne prenons point les choses à la rigueur : accordons à M. de Thou que l’année dont il parle ne concerne que l’installation de Zanchius, nous ne laisserons pas de le critiquer justement, puisqu’il est sûr que Zanchius fut installé l’an 1553, non en la place de Martyr, mais en celle d’Hédion. Successit ei (Caspari Hedioni) in professione Hieronymus Zanchius Italus [11]. Cùm anno quinquagesimo tertio, in demortui Casparis Hedionis locum theologus, qui in scholâ sacras litteras doceret, esset sufficiendus : ab amplissimo illius reipubl. magistratu et scholarchis decretum est Italum quen-

  1. Voyez la citation précédente.
  2. Hospin., Historiæ Sacrament. parte II, pag. 536.
  3. Idem, ibid.
  4. Idem, ibidem, pag. 543,
  5. Idem, ibid.
  6. Elle est au IIe. livre des Lettres de Zanchius, p. 81 et seq.
  7. Thuan., lib. XCIX, pag. 379.
  8. Cette lettre est au IIe. livre de celles de Zanchius, pag. 444 et suiv.
  9. Thuanus, Hist., lib. XCIX, pag. 379, ad ann. 1590.
  10. Meîch. Adam., in Vit. Theol. exter., pag. 149.
  11. Melch. Adam., in Vit, Theol. german., pag. 242.