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ZÉNON.

réponse n’est pas digne d’un philosophe.

(A) C’était un bel homme. Quelques écrivains prétendent qu’il fut aimé de son précepteur plus qu’il ne fallait. ] Je rapporte ailleurs[1] le reproche qui fut fait à Apulée qu’il était beau, et qu’il s’habillait trop proprement pour un philosophe. Il répondit, entre autres choses, que la beauté n’a pas été toujours séparée des personnes de sa profession, et il le prouve par l’exemple de Pythagoras, et par celui de Zénon d’Élée. [2] Pratereà, licere etiam philosophis esse vultu liberali. Pythagoram, qui primum sese philosophum nuncupârit, eum sui sæculi excellentissimâ formâ fuisse : item Zenonem illum antiquum Velia [3] oriundum, qui primus omnium dictionem solertissimo artificio ambifariam dissolverit, eum quoque Zenonem longè decorissimum fuisse, ut Plato autumat. La citation de Platon est juste ; mais il y a de certaines choses dans le passage de Platon qui n’ont pas été approuvées de tout le monde, et je crois qu’on a eu raison de l’en censurer. Voici ce qu’il dit : Ἔϕη δἐ δὴ ὁ Ἀντιϕῶν, λέγειν τὸν Πυθόδωρον ὅτι ἀϕίκοντό ποτε εἰς Παναθήναια τὰ μεγάλα Ζήνων τε καὶ Παρμενίδης· τὸν μὲν οὖν Παρμενίδην, εὐ μάλα ἤδη πρεσϐύτην εἶναι, σϕόδρα πολιόν, καλὸν δὲ καὶ ἀγαθὸν τὴν ὄψιν, περὶ ἔτη μάλιςα πέντε καὶ ἑξὴκοντα. Ζήνωνα δὲ, ἐγγὺς ἐτῶν τετταράκοντα τότε εἶναι, εὐμήκη δὲ, καὶ χαρίεντα ἰδεῖν· καὶ λέγεσθαι αὐτὸν παιδικὰ τοῦ Παρμενίδου γεγονέναι. Dicebat ergò Antiphon, Pythodorum narrâsse, Zenonem atque Parmenidem venisse quondam ad magnorum Panathenæorum celebritatem : et Parmenidem jam senem, atque canum, aspectu decorum fuisse, annos fermè quinque et sexaginta ætatis agentem ; Zenonem vero annos penè quadraginta natum procero insuper et grato corporis habitu : dicebatur autem in deliciis Parmenidi fuisse [4]. Athénée le blâme d’avoir donné cette atteinte, sans nécessité, aux mœurs des deux philosophes. Ceux qui voudront connaître ses termes seront bientôt satisfaits. Παρμενίδῃ μὲν γὰρ καὶ ἐλθεῖν εἰς λόγους τὸν τοῦ Πλάτωνος Σωκράτην, μόλις ἡ ἡλικία συγχωρεῖ· οὐχ ὡς καὶ τοιούτους εἰπεῖν ἢ ἀκοῦσαι λόγους τὸ δὲ πάντων σχετλιώτατον, καὶ τὸ εἰπεῖν οὐδεμιᾶς κατεπειγούσης χρείας, ὅτι παιδικὰ γεγόνοι τοῦ Παρμενίδου Ζήνων ὁ πολίτης αὐτοῦ. Parmenidem certè cum Socrate Platonis confabulatum fuisse ætas vix permittat, nedùm hos vel illos sermones edisseruisse, aut audivisse. Quod autem indignissimum est, nullâ compulsus necessitate scribere is non erubuit Parmenidi Zenonem civem suum in amoribus et deliciis fuisse[5]. (B) Il fut l’inventeur de La dialectique. ] Aristote lui en donne la louange, comme Sextus Empiricus[6] et Diogène Laërce[7] l’ont remarqué. Cette dialectique de Zénon semble avoir été destinée à brouiller tout, et non pas à éclaircir quelque chose. Il ne s’en servait que pour disputer contre tout venant, et pour réduire ses adversaires au silence, soit qu’ils soutinssent le blanc, soit qu’ils soutinssent le noir. Plutarque nous en donne cette idée. Διήκουσε δὲ Περικλῆς καὶ Ζήνωνος τοῦ Ἐλεάτου, πραγματευομένου περὶ ϕύσιν ὡς Παρμενίδης· ἐλεγκτικὴν δέ τινα, καὶ δι᾽ ἐνἀντιολογίας εἰς ἀπορίαν κατακλείουσαν ἐξασκήσαντος ἕξιν· ὥσπερ καὶ Τίμων ὀ Φλίάσιος εἴρηκε διὰ τούτων.

Ἀμϕοτερογλώσσου τε μέγα σθένος οὐκ ἀπάτηλον
Ζήνωνος, παντων ἐπιλήπτορος.


Audivit Pericles Zenonem quoque Eleatem, de naturâ, Parmenidis more, philosophantem : qui impugnans quemlibet, usum paraverat quemdam refutandi, qui deduceret ad perplexitatem. Quod Phliasius Timon affirmat quoque, his verbis,

Omnia perstringens, Zeno disceptat, utrâqne
Ex parte invictus, sed non fallax[8].

  1. Dans l’art. d’Apulée, rem. (H), t. II, p. 211.
  2. Apuleïus, Apolog., pag. m. 275, 276.
  3. Voyez M. Ménage, in Diogenem Laërt., lib. IX, num. 28, où il montre que Vélia est la même ville d’Italie qu’Eléa.
  4. Plato, in Parmenide, pag. m. 1110, A.
  5. Atheneus, lib. XI, pag. 505, F.
  6. Sextus Empiricus, adversùs Mathematic., pag. 139.
  7. Diog. Laërt., lib. IX, num. 25.
  8. Plut., in Pericle, pag. 154. On verra la traduction française d’Amyot ci-après, remarque (E), cit. 44.