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ZOROASTRE.

pes et non pas Hydaspes dans ce passage de Lactance : c’est ainsi que les bons critiques ont corrigé les deux endroits où Justin Martyr a fait mention de ce prophète païen ; dans l’un, pour nous apprendre qu’il a prédit l’incendie de toutes les choses périssables ; dans l’autre, pour observer que la lecture de ses écrits était défendue à peine de la vie, parce qu’elle pouvait découvrir les vérités que les infidèles persécutaient[1], Κατ᾽ ἐνέργειαν δὲ τῶν ϕαύλων δαιμόνων, θάνατος ὡρίσθη κατὰ τῶν τὰς Ὑςάσπου ἢ Σιϐύλλης, ἢ τῶν προϕητῶν βίϐλους ἀναγινωσκόντων, ὅπως διὰ τοῦ ϕόϐου ἀποστρέψωσιν ἐντυγχάνοντας τοὺς ἀνθρώπους τῶν καλῶν γνῶσιν λαϐεῖν, αὐτοῖς δὲ δουλεύοντας κατέχωσιν· ὅπερ εἰς τέλος οὐκ ἴσχυσαν πρᾶξαι. Operâ autem et instinctu malorum dæmonum mortis supplicium adversùs librorum Hydaspis aut Sibyllæ aut prophetarum lectores constitutum est : ut per timorem homines ab illis, quò minùs scripta ea legentes rerum bonarum notitiam percipiant, sed in servitute eorum retineantur, absterreantur[2]. Pour le dire en passant, ces écrits-là[3], aussi-bien que ceux des sibylles, étaient de la forge pieuse de quelques chrétiens. Disons que M. Marsham pouvait se servir encore d’une autre preuve, et la bâtir de cette façon : Clément d’Alexandrie a prétendu que Zoroastre ne différait point du Pamphylien fils d’Arménius : or, selon Arnobe, ce Pamphylien a été ami de Cyrus, et nous lisons dans Hérodote un entretien de Cyrus et d’Hystaspe, père de Darius : il est donc vrai que Zoroastre et cet Hystaspe ont vécu en même temps[4]. M. de Valois le jeune affirme[5] que, selon le témoignage d’Agathias, quelques-uns disaient qu’Hystaspe, le docteur des mages, était beaucoup plus ancien que le père de Darius. Il est certain qu’Agathias ne dit point cela, et qu’au contraire il se plaint de ce que les Perses ne marquaient pas si leur Hystaspe était le père de Darius ou non. Je ne remarque ceci qu’afin qu’on voie que les citations des auteurs les plus judicieux nous trompent souvent, et qu’ainsi la prudence veut que l’on vérifie les passages, qui que ce soit qui les allègue. Je répète ici cette observation ; je me souviens bien de l’avoir faite en d’autres endroits.

Je n’aurais jamais fait si je voulais relever toutes les inexactitudes de nos auteurs, et rapporter toutes les variétés qui concernent la chronologie de Zoroastre. Mais voici de quoi confirmer encore la pensée de M. Marsham. On a dit que Pythagoras fut disciple de Zoroastre, sous le règne de Cambyse, fils de Cyrus. J’ai cité ailleurs[6] les paroles d’Apulée qui nous apprennent ce fait. Quelques-uns les entendent comme si Pythagoras, ayant été fait esclave en Égypte, avait été transporté en Perse. Quelques autres veulent qu’il ait été transporté en Babylone, et qu’il y ait été instruit par Zoroastre le Babylonien, qu’ils distinguent du Persan. Hisce (quinque Zoroastris) addi potest Sextus Zoroaster, sic enim ab [* 1] Apuleio vocatur, qui Babylone vixit, quo tempore Pythagoras captivus à Cambyse eo deductus est. Idem scriptor cum vocat, omnis divini arcanum antistitem, eoque magistro præcipuè usum esse Pythagoram dicit. Videtur idem esse ac Zabratus, à quo Diogenes [* 2] affirmat Pythagoram purgatum esse omnibus pristinæ vitæ sordibus, et edoctum quarum rerum probos expertes esse oporteret, uti et physicam. Idem quoque erit Nazaratas Assyrius, quem Alexander, in libro de Pythagoricis Symbolis, affirmat magistrum fuisse Pythagoræ. Hunc eundem Suidas vocat, Zarem, Cyrillus Zaranem, Plutarchus Zaratam[7]. Ces paroles sont tirées d’un ouvrage de Thomas Stanlei ; je ne sais point ce qu’il veut dire lorsqu’il remarque qu’Apulée se sert de cette expression Sextus Zoroaster : je ne la trouve point du

  1. (*) In Floridis.
  2. (*) Porphyr. Vit. Pythagoræ.
  1. Justinius, apolog. II, pag. 66.
  2. Idem, ibidem, page 82.
  3. Voyez de quelle manière Clément d’Alexandrie, Strom., lib. VI, pag. 636, D, en parle.
  4. Herod., lib. I, cap. CCIX.
  5. Hadrian. Valerius in Ammian. Marcellin., lib. XXII, page 374.
  6. Ci-dessus, citation (25) de l’article Pithagoras, tome XII, page 130.
  7. Thomas Stanleius, Hist. Philosophiæ orientalis, lib. I, cap. II, pag. 8 et 9.