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ACHÉMÈNES.

pour lui faire boire des eaux dorées. Achæus, Lydiæ Mæoniæque rex, gentilitio avaritiæ crimine ardebat ; is siquidem creba ac gravia populis tribula semper imperabat, in quibus exigendis sævus, improbus, atque inexorabilis erat : verùm cùm tantam injuriam diutiùs populi ferre nequirent, nocturnâ tesserâ inter se datâ, subitò hominum concursu illum cum omni familiâ trucidaverunt, et regiâ incensâ ejus cadaver unco tractum in Pactolum flumen demerserunt, ut auri feras aquas semper potaret[1]. Remarquez d’abord qu’il se trompe en prétendant que notre Achée était Lydien, issu des anciens rois du pays, et héritier de leur avarice. Il songeait et aux richesses de Crésus et aux demandes de Midas[2] : il eût mieux valu se souvenir qu’Achée était Syrien. Mais cette faute est petite en comparaison du reste ; car toutes les circonstances de ce narré sont des mensonges. M. de Boissieu se persuade que les mauvais interprètes de ces paroles d’Ovide,

Morte vel intereas capti suspensus Achæi,
Qui miser auriferâ pependit aquâ[3],


ont trompé cet écrivain. Il observe avec raison qu’elles signifient qu’on pendit le corps d’Achée proche du Pactole[4]. Il ajoute que Zarottus est le premier qui ait entrevu la pensée du poëte, et que Léopardus la connue pleinement, et qu’ainsi Lipse n’a pas dû se glorifier de la première découverte du vrai sens de ce passage. Hanc esse poëtæ nostri mentem primus vidit Zarottus, sed quasi per nebulam ; et omninò Paulus Leopardus Emendat. lib. I. cap. 20, ideò non erat, quò Justus Lipsius, lib. I. de Cruce, cap. 4, principem sibi hujus loci explanationem tribueret. Valeat autem Alciatus cum suâ illâ explicatione, quam libro IX, capite 24, Parergon Juris inseruit[5]. Quoi qu’il en soit, François Patrice place très-mal ses exemples. Achée ne fut point puni pour son avarice, mais pour son ambition. Aquilius, qu’on lui associe[6], à cause que Mithridate lui fit verser de l’or fondu dans la bouche, n’a rien de commun avec la vengeance qu’Antiochus employa.

  1. Franciscus Patricius, de Regis Institutione, lib. IV, tit. IX, pag. 242.
  2. Ovidii Metam. lib. XI, vs. 103.
  3. Ovnidius, in Ibin, vs. 301.
  4. Dionys Salvagnii Boessii Notæ in libellum Ovidii in Ibin, pag. 63.
  5. Idem, ibid.
  6. Patricius, de Reg. Instit. lib. IV, lib. IX, pag. 243.

ACHÉMÈNES a été le père de Cambyses, et le grand-père de Cyrus, premier roi de Perse, si nous en croyons Hérodote[a]. Il y a d’autres passages où cet auteur semble parler d’un Achèmènes beaucoup plus ancien que celui-là ; car il dit que la nation persane était divisée en plusieurs espèces dont la plus illustre était composée des Pasargades, sous lesquels étaient compris les Achéménides, dont les rois de Perse descendaient[b]. Il introduit ailleurs[c] Cambyses, fils de Cyrus, exhortant au lit de la mort les principaux seigneurs de Perse, et surtout les Achéménides, à ne point souffrir que les Mèdes recouvrissent la royauté. Cela semble donner l’idée d’un Achémènes, tige de ces Achéménides, beaucoup plus ancien que l’aïeul de Cyrus. Étienne de Byzance fait mention d’un Achémènes, fils d’Égée, qu’il prétend avoir donné son nom à une province de Perse nommée Achéménie. D’autres disent que cet Achémènes fut fils de Persée[d] ; d’autres infèrent cela de ce que les rois de Perse étaient descendus de Persée (A). Presque tous les commentateurs d’Horace veulent que l’Achémènes dont il parle dans l’ode 12e. du IIe. livre com-

  1. Herodot. lib. VII, cap. XI.
  2. Idem, lib. I, cap. CXXV.
  3. Idem, lib. III, cap. LXV.
  4. Nicolaüs. lib. II, Histor. apud Etymol. magni Autorem.