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AGRIPPA.

riblement prévenu contre lui l’esprit de cette princesse (M). On lui rendit les mêmes mauvais offices auprès de sa majesté impériale [a]. Le Traité de La Vanité des Sciences, qu’il fit imprimer en 1530, irrita furieusement ses ennemis[b]. Celui qu’il publia bientôt après à Anvers [c], de la Philosophie occulte [d], leur fournit encore plus de prétextes de le diffamer. Bien lui valut que le cardinal Campège, légat du pape, et le cardinal de la Mark, évêque de Liége, parlassent pour lui[e]. Leurs bons offices ne firent pas qu’il pût recevoir un sou de sa pension d’historiographe, et n’empêchèrent point qu’il ne fût mis dans les prisons de Bruxelles l’an 1531[f]. Il n’y demeura pas long-temps. Il fit une visite l’année suivante à l’archevêque de Cologne[g] ; il lui avait dédié sa Philosophie occulte, et il en avait reçu une lettre remplie d’honnêtetés[h]. La crainte des créanciers fut cause qu’il se tint dans le pays de Cologne plus long-temps qu’il aurait voulu [i]. Il s’opposa vigoureusement aux inquisiteurs qui avaient fait arrêter l’impression de sa Philosophie occulte, lorsqu’il en faisait faire à Cologne une nouvelle édition, corrigée et augmentée. Voyez la XXVIe. lettre de son septième livre, et les suivantes. En dépit d’eux, on acheva l’impression ; c’est celle de l’an 1533. Il se tint à Bonn jusqu’en l’année 1535. Alors il eut envie de retourner à Lyon. On l’emprisonna en France pour quelque chose qu’il avait écrit contre la mère de François Ier. ; mais il fut élargi, à la prière de quelques personnes, et il s’en alla à Grenoble où il mourut la même année 1535[j]. Quelques-uns disent qu’il mourut à l’hôpital ; mais, selon Gabriel Naudé, ce fut chez le receveur général de la province de Dauphiné, le fils duquel a été premier président de Grenoble[k]. M. Allard, page 4 de la Bibliothéque de Dauphiné, assure qu’Agrippa mourut à Grenoble, dans la maison qui appartient à la famille de Ferrand, rue des Clercs, qui était alors au président Vachon, et qu’il fut enterré aux Jacobins. Il vécut toujours dans la communion romaine : ainsi on n’a pas dû dire qu’il a été luthérien (N). Je ne crois point qu’il ait écrit pour le divorce de Henri VIII (O). Quant à la magie dont on l’accuse, je consens que chacun en croie ce qu’il voudra. Une chose sais-je bien, c’est que les lettres qu’il écrivait à ses intimes amis, sans prétendre qu’elles fussent un jour imprimées, portent toutes les marques d’un homme stylé aux réflexions de religion et au langage du christianisme. Ses accusateurs n’ont pas été bien informés de ses aventures (P), et cela énerve leur témoignage.

  1. Epist. XV libri VI, pag. 969.
  2. Epist. XX libri VI, pag. 974
  3. Epist. XIV libri VI, pag. 968.
  4. Voyez la remarque (Q).
  5. Agrippa, Epist. XX libri VI, pag. 975 ; Epist. XII libri VII, pag. 1010 ; Epist. XXI libri VII, pag. 1022.
  6. Epist. XXIII libri VI, pag. 980.
  7. Epist. VI libri VII.
  8. Epist. I libri VII.
  9. Epist. XXI libri VII, pag. 1024.
  10. Joh. Wierus, de Magis, cap. V, p. 111.
  11. Naudé, Apolog. des grands Hommes, pag. 427.