Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique (1820) - Tome 1.djvu/368

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
322
AILLI.

Fœsulæ, quod Carræ nuper ; idem nemus Aricinum, quod Hercynius saltus : Fregellæ, quod Gesoriacum : Tiberis, quod Euphrates. Coriolus quoque (proh pudor !) victus, adeò gloriæ fuit, ut captum oppidum Cajus Marcius Coriolanus quasi Numantiam aut Africam nomen induerit[1]. Mais quelque honte qu’il y eût pour les Français à n’avoir pu prendre Aiguillon avec tant de gens commandés par le fils aîné de leur roi, ce fut une grande gloire pour les Anglais d’avoir défendu si long-temps ce poste.

  1. Florus, cap. XI, lib. I.

AILLI[a] (Pierre d’), évêque de Cambrai[b] et cardinal, naquit à Compiègne en Picardie (A), l’an 1350. Sa famille était fort obscure[* 1] : quelques-uns disent qu’il fut sous-portier du collége de Navarre[c], mais ils se trompent. Il n’entra dans ce collége qu’environ l’an 1372. Il y fut reçu boursier parmi les étudians en théologie. Il était alors procureur de la nation de France dans l’université de Paris, et capable de s’ériger en bon auteur, comme il le témoigna par des traités de logique (B), selon les hypothèses des nominaux, et par des traités sur la nature de l’âme et sur celle des météores. Il fit paraître tant de pénétration et de netteté dans ses ouvrages, qu’il jeta par-là les fondemens de cette haute réputation où il s’est vu élevé. Il ne réussit pas moins dans l’explication de Pierre Lombard, en l’année 1375. Cette heureuse application à la science de l’école ne l’empêcha pas de devenir bon prédicateur. Il obtint le doctorat en 1380, et un canonicat à Noyon. Il fut rappelé à Paris quatre ans après, pour y exercer la charge de grand-maître du collége de Navarre. Il y eut une infinité de disciples et entre autres Jean Gerson et Nicolas de Clémangis, Il plaida avec tant de force, en 1387, devant le pape[d], contre un jacobin [e] appelant de la sentence que la faculté de théologie de Paris avait prononcée contre lui, qu’il obtint la confirmation de cette sentence. Il fit aussi un Traité contre ce même jacobin. Cela le mit dans une telle réputation, qu’en 1389 il fut fait confesseur et aumônier de Charles VI (C), et chancelier de l’université. Cinq ans après, on lui conféra la première dignité de la Sainte-Chapelle de Paris ; c’est celle de trésorier. Tant de différens emplois n’empêchèrent pas qu’il ne s’appliquât fortement à chercher les moyens les plus efficaces de faire cesser le schisme qui divisait l’Église romaine. Il alla trouver de la part du roi l’anti-pape Benoit XIII, en 1394, et il lui rendit un témoignage si avantageux à son retour, qu’il fut résolu au conseil du roi de le reconnaître pour le pape légitime. Il obtint l’évêché du Puy en Vellay[f], sur la fin de l’année 1395, et celui de Cambrai au commence-

  1. * Chauſepié raconte quelques particularités sur d’Ailli, et entre autres, qu’il était fils d’un boucher.
  1. En latin, Petrus de Alliaco, ou ab Alyaco, ou Alliacensis, ou Alliacus, ou Ailliacus, etc.
  2. Thevet et Vossius, de Hist. Lat., pag. 548 ; de Sc Math., pag. 182, 228, l’en font archevêque.
  3. Voyez la remarque (A).
  4. C’est l’anti-pape Clément VII qui siégeait à Avignon.
  5. C’était un Aragonais, nommé Jean de Monteson, qui niait la Conception immaculée de la Vierge.
  6. Selon Moréri, ce fut l’évêché de Bellei, mais il se trompe.