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AYRAULT.

gées. M. Ménage en avait promis[1] une nouvelle édition qu’il devait accompagner de petites notes marginales qui auraient indiqué les sources d’où Ayrault avait tiré ses exemples. L’ouvrage est fort docte : Continet enim res ab omni antiquitate apud Indos, Judæos, Græcos, Romanos, Francos, alios que judicatas[2]. Celui qu’il fit en français, de l’Ordre et instruction judiciaire dont les anciens Grecs et Romains ont usé en accusations publiques, conféré à l’usage de nostre France, est bon et curieux. Il fut imprimé pour la première fois à Paris, en 1575, in-8o. La seconde édition, qui est de Paris, en 1588, in-4o., fut augmentée de deux livres. La troisième fut augmentée d’un livre, à Paris, l’an 1598, in-4o.[3]. Ainsi l’ouvrage comprend quatre livres. Le quatrième livre, qui traite des Procès faits au cadavre, aux cendres, à la mémoire, aux bestes brutes, choses inanimées, et contumax, avait été imprimé à part, à Paris, en 1591, in 8°. J’ai oublié de dire que son Traité de Decretis Rebusve apud diversos populos ab omni antiquitate judicatis, fut imprimé à Francfort, l’an 1580, sur la première édition. Les abréviateurs de Gesner n’ont connu notre Pierre Ayrault que par cette édition d’Allemagne. Ils ont mal cru qu’il s’appelait Paul.

(C) Par intérim. ] M. Ménage fait durer deux ans cet interim : Et præturæ munere per biennium functus Ærodius est[4] ; et néanmoins il dit qu’Ayrault ne fut nommé à cette charge que le onzième de mai 1589, et qu’Henri-le-Grand en pourvut un autre au commencement de l’année 1590, ineunte anno 1590[5].

(D) Sa Harangue a été imprimée avec le Discours, etc. ] M. Ménage n’a pas bien marqué le temps auquel ces deux pièces furent imprimées : il dit que ce fut en 1577, et qu’alors le prince qui y est loué était roi de Pologne et duc d’Anjou. C’est dire assez clairement qu’il n’était pas roi de France : néanmoins le duc d’Anjou fut sacré à Reims au mois de février 1575, et il était censé roi de France dès le jour que Charles IX décéda[6]. Soyez assuré que la Harangue et le Discours en question parurent en 1570, et par conséquent lorsque celui qu’on y louait n’était pas encore roi de Pologne.

(E) Le Traité de La Puissance paternelle. ] L’auteur l’écrivit en français et en latin : un de ses compatriotes, nommé Jacob Frubert, le traduisit en italien[7]. Voyons ce qu’en dit M. Ménage : Egit cum fugitivo filio tanquàm cum absente reo, hoc est annotatione et programmate :

Qualis populeâ mœrens philomela sub umbrâ
Amissos queritur fœtus[8],


et quæ sequuntur : Notum enim tibi carmen est : talis Petrus Ærodius amissum filium insolabiliter in scriptis suis queritur. Vide quæso.... quos ipse questus fundat in libro tertio Ordinis judiciarii, modò fratrem Johannem Ærodium, modò Renatum filium compellans. Quis verò tam ferus ac ferreus est, qui cùm querelas ejus legat in libello illo aureo, et tot laudibus à Stephano Pascasio celebrato [9], quem de Patrio Jure ad fugitivum filium contra jesuitas scripsit, à gemitu et lacrimis temperare possit ?.…. At non solus Ærodius fatum suum gemuit, ingemuêre et alii : lege Stephani Pascasii et Johannis Bodini [10] eâ de re ad Petrum Ærodium Epistolas. Lege Antonii Arnaldi advocati Parisiensis..… Orationem pulcherrimam, habitam in senatu Parisiensi, contra jesuitas, anno MDLXXXXIV[11]. M. Ménage a rapporté dans ses remarques ce qu’Antoine Arnauld dit là-dessus, et ce qui fut répondu par Pierre Barni, procureur des jésuites du collége de Clermont. La réponse va là, que les jésuites ne voulurent jamais recevoir en France René Ayrault, bien qu’il eust pour de moins dix-huit ans ; mais que, sans leur rien découvrir, il s’en alla en

  1. In Vitâ. Ærodii, pag. 28.
  2. Ibidem, pag. 27.
  3. C’est ainsi qu’il faut traduire ces paroles de M. Ménage : Quem posteà anno 1588 duobus libris et anno 1598 tribus auctiorem in eâdem urbe publicavit. Vita Petri Ærodii, pag. 17.
  4. Ibidem, pag. 24.
  5. Ibidem, pag. 23.
  6. C’était le 30 de mai 1574.
  7. Menagii Vita P. Ærodii, pag. 28.
  8. Virgil. Georgie., lib. IV, vs. 511.
  9. Voyez la Xe. Lettre du Livre XIe. des Lettres de Pasquier.
  10. M. Ménage produit la Lettre de Bodin, pag. 242.
  11. Ménage, Vita Ærodii, pag. 37.