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AMPHILOCHUS.

κόλπῷ, ὁμώνυμον τῇ ἑαυτοῦ πατρίδι Ἄργος ὀνομάσας. Καὶ ἦν ἡ πόλις ἅυτη μεγίςη τῆς Ἀμϕιλοχίας, καὶ τοὺς δυνατωτάτους εἶχεν ὀικήτορας[1]. Argos Amphilochicum et reliquam Amphilochiam Amphilochus Amphiarai filius, post bellum Trojanum domum reversus, cùm rerum status, qui Argis erat, ei non placeret, condidit in sinu Ambracico, urbem de eodem patriæ suæ nomine Argos nominans, et erat hæc urbs omnium Amphilochiæ regionis maxima, et potentissimos habebat incolas. Strabon allègue ce témoignage de Thucydide ; mais il ajoute quelque chose : c’est qu’Amphilochus, mal satisfait du gouvernement établi dans Argos, s’en alla en Acarnanie, où il recueillit la succession de son frère [2]. Thucydide ne dit point ceci ; et par conséquent Strabon a tort de le lui attribuer. Ceux qui prétendent qu’il adopte l’opinion de Thucydide [3] se trompent ; car il paraît lui préférer l’historien Éphorus, qui a dit que la ville d’Argos Amphilochium fut bâtie par Alcméon, et que son fondateur lui fit porter le nom de son frère. Μετὰ δε τὴν Ἀμϐρακίαν τὸ Ἀργος ἐςὶ τὸ Ἀμϕιλοχικόν κτίσμα Ἀλκμαίωνος καὶ τῶν παίδων[4]. Post Ambraciam Argos sequitur Amphilochium urbs ab Alcmæone ejusque liberis condita. Il ne faut pas dire qu’Apollodore n’a suivi ni Thucydide, ni aucun autre écrivain, en assurant qu’Amphilochus était le fils d’Alcméon[5] ; car il ne conte cela que sur la foi d’Euripide [6]. Notez qu’il observe que cet Amphilochus alla demeurer à Argos Amphilochium par le conseil d’Apollon.

Observons une grande différence entre Thucydide et Strabon. L’un dit qu’Amphilochus, étant retourné à Argos après la prise de Troie, et n’y trouvant pas les choses dans l’état qu’il aurait voulu, se retira vers le golfe d’Ambracie, et y bâtit une ville [7]. L’autre raconte qu’Amphilochus, ayant bâti Mallus dans la Cilicie, après la prise de Troie, revint à Argos, et s’y chagrina de l’état des choses, et s’en retourna en Cilicie, où il fut tué et enterré[8]. Voici d’autres brouilleries. Euripide dit qu’Alcméon, devenu furieux, coucha avec Manto, fille de Tirésias, et en eut un fils et une fille ; celui-là nommé Amphilochus, et celle-ci Tisiphone[9]. Cet Amphilochus, obéissant à un oracle, fut s’établir dans Argos Amphilochium. Nous avons vu[10] que Lucien prétendait que l’Amphilochus, dont l’oracle était si célèbre à Mallus, était fils d’Alcméon. Les autres disent qu’il était fils d’Amphiaraüs. Il y a deux partis à prendre parmi toutes ces confusions. L’un est de dire qu’il n’y a eu qu’un Amphilochus, dont l’histoire n’a été rapportée que par morceaux ; c’est-à-dire que par des auteurs qui ont omis une partie de ses aventures. L’autre est de prétendre qu’il y a eu deux Amphilochus, l’un fils d’Amphiaraüs, et l’autre fils d’Alcméon, et que les auteurs ont quelquefois donné à l’un ce qui convenait à l’autre. On me persuaderait facilement que l’Amphilochus qui eut un oracle dans la Cilicie est fils d’Amphiaraüs, et que celui qui fut s’établir dans l’Acarnanie est fils d’Alcméon. La ville d’Argos de ce pays-là fut bâtie par Alcméon, et par ses fils : Τὸ Ἄργος τὸ Ἀμϕιλοχικὸν κτίσμα Ἀλκμαίωνος καὶ τῶν παίδων[11]. Argos Amphilochicum urbs ab Alcmæone ejusque liberis condita. C’est ma première preuve. Amphilochus fils d’Alcméon fut averti par l’oracle d’aller demeurer dans cette ville d’Argos[12]. Voilà ma seconde preuve. Pausanias observe que la postérité de Mélampus régna dans Argos, jusqu’à ce qu’Amphilochus, après la prise de Troie, se retira au pays qu’on nomma à cause de lui Amphilochie [13]. C’est l’Argos Amphilochium et le voisinage. Or, il y a six générations depuis Mélampus jusqu’à cet Amphilochus : Ἀπὸ δε Μελάμποδος γενεαί τε ἓξ καὶ ἄνδρες ἔασι μέχρις Ἀμϕιλόχου τοῦ Ἀμϕιαράου[14]. A Melam-

  1. Thucydides, lib. II.
  2. Strabo, lib. VII, pag. 225.
  3. Berkelius, in Steph. Byzant., pag. 124.
  4. Ephorus, apud Strabonem, lib. VII, pag. 225.
  5. Berkelius le dit pourtant dans ses Notes sur Étienne de Byzance, pag. 124.
  6. Apollodor., lib. III, pag. 201.
  7. Thucydid., lib. II.
  8. Strabo, lib. XIV, pag. 484, 485.
  9. Euripides, apud Apollodorum, lib. III, pag. 201.
  10. Dans la remarque précédente, citation (6).
  11. Strabo, lib. VII, pag. 225.
  12. Apollodorus, lib. III, pag. 201.
  13. Pausan., lib. II, pag. 60.
  14. Idem, ibid.