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nouvelles tendances, ceci regarde l’histoire littéraire et nous indiffère ici. Qu’il y ait, à l’heure présente, un Verhaeren, envisagé dans ses origines, son labeur, ses impulsions et surtout son tempérament, — complètement à part d’un mouvement avec lequel on s’obstine à le confondre — voilà ce qui seul nous importe. Et qu’on ne nous accuse pas pour cela d’un manque de considération et d’estime envers la génération qui reconnut pour chefs les Moréas, les de Régnier, les Vielé-Griffin et les Kahn, sous le consulat de Mallarmé. Elle a joué sa partie dans l’ensemble du travail poétique au XIXe siècle, ce pourquoi il lui sera rendu justice un jour exactement. Quoi qu’il en soit, l’un de ses mérites incontestables fut le catholicisme de ses admirations. Rappelant à cet égard les romantiques, elle n’a jamais eu peur d’affirmer ses sympathies ferventes, et même exclusives, pour des « exotiques », comme disait feu Sarcey. Nous devons toujours lui savoir gré amplement d’avoir, dans l’universel silence, accueilli, exalté un Verhaeren, et contribué pour une forte part à la popularité d’un Maeterlinck et d’un Ibsen. Cette clairvoyance et ce courage, personne ne songe à les lui contester. Mais lui appartiendrait-il, en échange, de retenir, d’accaparer, de monopoliser, de s’annexer une individualité qui dépasse, non seulement de la tête mais du torse entier, tous les groupes et qui se signale de loin par quelque chose d’intimement personnel et d’absolument unique, quelque chose d’immense que j’es-