Limerel », et elles l’aimaient toutes. Qu’elle parlât avec l’une ou avec l’autre, elle n’était pas différente, et la longueur des bavardages en faisait toute l’intimité. Madame Victor Limerel avait entendu parler trop de femmes et trop d’hommes pour qu’une sottise, un peu plus grosse que de coutume, la scandalisât. Les formes seules, quand elles étaient brutales, la choquaient. Cependant, tout opprimée qu’elle fût par son mari et par le monde, quelque chose d’elle-même, de la femme qu’elle aurait pu être, bonne, tendre et enthousiaste, subsistait, et vivait en dessous, pauvrement. Lorsqu’elle était seule, avec son mari ou son fils, il lui arrivait d’être elle-même, de penser ou de parler selon des préférences qui étaient des débris de principes et des épaves de conscience. Elle usait de phrases vagues, toujours les mêmes. Elle disait : « Je crois que vous vous trompez… Vous allez trop loin. Je n’ai pas été élevée dans ces idées-là… Non, je n’admets pas cela… Faites ce que vous voudrez, moi, je ne partage pas votre sentiment, je m’abstiens. » L’abstention était le plus grand effort de son courage. Dans les églises où elle
Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/128
Apparence