Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/276

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plus héroïque. Tu te composes une douleur en partie factice et adulatrice. Tu t’y cherches. Je te connais, va, je connais le pauvre cœur qui se trompe lui-même si souvent. Il y a de l’orgueil dans ta peine.

— Il y a bien de la pitié, je vous assure !

— Eh bien ! garde la pitié, mais devant Dieu seulement : elle est juste. Et chasse le reste : tout le bourdonnement de ce qui aurait pu être, tout ce qui a pu te faire hésiter, tout ce qui est toi-même, tout ce qu’a repoussé déjà, dans une heure de souffrance et de salut, ta chère âme victorieuse… Sacrifie l’histoire de ton amour, Marie, puisque l’amour, tu l’as condamné…

Marie prit dans sa main gauche les premières pages du livre posé sur ses genoux, et très lentement le ferma. Elle le fit machinalement, sans mettre dans le geste aucune intention symbolique. Puis elle dit, de ce ton pénétré par où se manifeste la présence totale de l’esprit dans les mots :

— J’essaierai. Je crois que vous avez raison en toute chose…

— Il faut que tu montes plus haut, Marie, il faut monter jusqu’où est la paix.