Page:Bazin - La Terre qui meurt, 1926.djvu/44

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espérance, elle qui n’en avait pas. Et, sans doute, une vertu apaisante, une force consolatrice émanait d’elle. Bientôt il se leva, de lui-même, et prit le bras de l’enfant, quand elle eut dit :

— À la maison, il y a Mathurin, mon père, qui vous attend.

Il considéra longtemps, attentivement, sa jolie petite Rousille, toute pâlie par la fatigue et l’émotion.

— C’est vrai, répondit-il ; il y a Mathurin ; il faut y aller.

Tous deux ils repassèrent devant la façade du château ; ils s’engagèrent dans l’allée qui menait aux communs, et, de là, dans les champs de la ferme. À mesure qu’ils approchaient de la Fromentière, Rousille sentait que le métayer reprenait la pleine possession de lui-même. Quand ils furent dans la cour, elle dit, dans un élan de pitié pour l’infirme :

— Mon père, Mathurin est bien malheureux aussi. Ne lui parlez pas trop de votre peine.

Le métayer, dont le courage et la claire raison étaient ressuscités, essuya ses yeux, et, précédant Rousille, poussant la porte de la salle où l’infirme étendu songeait à côté de la chandelle presque consumée :

— Mathurin, dit-il, mon enfant, ne te fais pas trop de peine… Ils sont partis, mais notre Driot va revenir !




VI

LE RETOUR DE DRIOT


Bientôt une lettre arriva, timbrée d’Alger. Elle donnait, jour par jour, les étapes du voyage. Sous les ormeaux de la Fromentière, ces mots se succédèrent à vingt-quatre heures d’intervalle, dits par l’un de ceux qui