Page:Bazin - La Terre qui meurt.djvu/35

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raconter qu’elle se marie ? Est-elle belle toujours, comme au temps où j’avais ses amitiés ? »

Lorsque Marie-Rose entra dans la salle de la Fromentière, ce fut lui seul qu’elle regarda, à la dérobée, et il lui parut qu’il avait son mauvais rire, et qu’il avait vu ou deviné la sortie du valet.

Près de Mathurin était assis François, bien différent de l’aîné, homme de taille moyenne, gras, rose et réjoui. Celui-là, Rousille ne le craignait point. Il s’occupait de son plaisir plus que de tout le reste. Travailleur médiocre, dépensier, coureur de foires et de marchés, il était facile à vivre car il avait besoin des autres. Physiquement et moralement, il ressemblait à Éléonore, de deux ans plus âgée que lui, ayant comme elle la figure large, des yeux bleus peu vivants, et une apathie de nature qui leur valait à tous deux les semonces fréquentes du père. Mais, tandis que la fille, protégée par le milieu, par l’influence de la mère à présent disparue, paysanne obscure et sainte, comme il en existe tant encore dans ces campagnes profondes, demeurait honnête, lui, la caserne l’avait perdu. Il avait subi la discipline militaire, mais sans en comprendre la nécessité, sans en retirer le profit qu’elle peut donner. On l’avait commandé, on l’avait puni, et fait aller, et fait