Page:Beauclair - La Ferme à Goron, 1888.djvu/11

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le brouillard. Mais il ne pouvait apercevoir ni le vapeur ni la barque du père Sandré, le passeur.

— Quel métier ! se dit-il.

Toujours vivre sur l’eau. À tout moment, être exposé à mourir. Le père Sandré se fait vieux, qu’un étourdissement le prenne dans sa barque, et puis, c’est fini ! Un bouillon ! Et les autres, ceux du vapeur, qui, pendant six mois de l’année, vont du Havre à Rouen et de Rouen au Havre ! Qu’ils se jettent sur un banc de sable, à l’embouchure, et puis, bonsoir ! Quant aux vrais marins, à ceux qui parcourent les mers lointaines, il n’osait y songer.

Depuis dix ans qu’il habitait Jumièges, il n’avait qu’une distraction : voir passer les bateaux. Mais jamais il ne s’était approché du talus, craignant un faux pas. Cette terreur insurmon-