Page:Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/131

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

avait eu des torts envers vous, j’en rendrais sa fille responsable. J’aimais et j’estimais Jeanne et j’étais certain que la jeune fille me payait de retour. Je persistai donc dans ma demande et M. Girard, après avoir hésité un instant, m’accorda la main de sa fille. Je vous demande maintenant de vouloir bien à votre tour oublier les discordes du passé en accordant votre consentement à mon mariage avec Jeanne Girard.

Le vieillard qui avait d’abord réussi à être calme devant la proposition inattendue de son fils, se laissa emporter par la violence de son caractère et répondit à Pierre d’une voix rendue tremblante par la colère :

— Ah ça ! monsieur mon fils ! je savais déjà que sur les questions politiques tu te permettais de différer d’opinion avec moi et j’avais bien voulu fermé les yeux sur cette insolence de ta part pour avoir la paix dans ma maison. Mais voilà que maintenant tu t’avises d’aller choisir une femme, sans me consulter, dans la famille d’un homme que je déteste et qui m’a jeté l’insulte à la figure dans une assemblée publique. J’ignore ce que t’a dit le père Girard, mais sache bien que s’il a oublié, lui, les rancunes du passé, je me souviens, moi, qu’il y a entre nous une haine de trente-cinq ans et que jamais, de mon consentement, un Mon-