Page:Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/287

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— Sortons d’ici, mon ami ! J’étouffe devant ces gens qui commencent à nous observer. Allons dans la rue, en plein air ; j’ai besoin de respirer. Je me sens faible. Viens ! Pierre, viens ! Allons ! je sens qu’il me faut verser des larmes, car mon cœur est prêt à se briser.

Et les deux amis s’élancèrent hors de la pension, au grand étonnement des personnes présentes qui ne comprenaient rien à leur brusque départ. Comme ils ne connaissaient pas la ville, ils s’en allèrent au hasard, sans dire un mot, et quelques passants s’arrêtaient pour regarder ces deux hommes à la mine hagarde et à l’air désespéré qui passaient ainsi, sans paraître s’occuper de la route qu’ils suivaient et des piétons qu’ils coudoyaient.

Jules et Pierre ne s’apercevaient de rien, et ils continuèrent leur promenade sans but jusqu’à ce que la fatigue les forçât de s’arrêter dans un parc où les avait conduits le hasard. Ils se laissèrent tomber sur un banc, et Pierre qui avait réussi à maîtriser ses émotions, rompit le silence fatigant qu’ils avaient observé jusque-là ;

— Voyons, mon cher Jules, calme-toi et pensons à ce qui nous reste à faire. Ta sœur n’est pas morte, heureusement, et nous pouvons espérer que ses blessures ne sont pas mortelles. Soyons hom-