Page:Beaumarchais - Œuvres choisies, édition 1913, tome 2.djvu/168

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LE COMTE, à part.

Que trop raison !

BRID’OISON.

Elle a, mon-on Dieu, raison.

MARCELINE.

Mais que nous font, mon fils, les refus d’un homme injuste ? ne regarde
pas d’où tu viens, vois où tu vas ; cela seul importe à chacun. Dans
quelques mois ta fiancée ne dépendra plus que d’elle-même ; elle
t’acceptera, j’en réponds ; vis entre une épouse, une mère tendres, qui
te chériront à qui mieux mieux. Sois indulgent pour elles, heureux pour
toi, mon fils ; gai, libre, et bon pour tout le monde ; il ne manquera
rien à ta mère.

FIGARO.

Tu parles d’or, maman, et je me tiens à ton avis. Qu’on est sot en
effet ! il y a des mille mille ans que le monde roule ; et dans cet océan
de durée où j’ai par hasard attrapé quelques chétifs trente ans qui ne
reviendront plus, j’irais me tourmenter pour savoir à qui je les dois !
tant pis pour qui s’en inquiéte. Passer ainsi la vie à chamailler, c’est
peser sur le collier sans relâche, comme les malheureux chevaux de la
remonte des fleuves, qui ne reposent pas, même quand ils s’arrêtent, et
qui tirent toujours quoiqu’ils cessent de marcher. Nous attendrons.

J’AI bien regretté ce morceau ; et maintenant que la pièce est connue, si
les comédiens avaient le courage de le restituer à ma prière, je pense
que le public leur en saurait beaucoup de gré. Ils n’auraient plus même
à répondre comme je fus forcé de le faire à certains censeurs du beau
monde, qui me reprochaient à la lecture de les intéresser pour une femme
de mauvaises mœurs.--Non, Messieurs, je n’en parle pas pour excuser ses
mœurs, mais pour vous