Page:Beaumarchais - Œuvres choisies, édition 1913, tome 2.djvu/173

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 noble et
du sien. Dans l’ouvrage que je défends, on n’attaque point les États,
mais les abus de chaque Etat ; les gens seuls qui s’en rendent coupables
ont intérêt à le trouver mauvais ; voilà les rumeurs expliquées : mais
quoi donc, les abus sont-ils devenus si sacrés, qu’on n’en puisse
attaquer aucun sans lui trouver vingt défendeurs ?

Un avocat célèbre, un magistrat respectable, iront-ils donc s’approprier
le plaidoyer d’un Bartholo, le jugement d’un Brid’oison ? Ce mot de
Figaro, sur l’indigne abus des plaidoiries de nos jours, (c’est
dégrader le plus noble institut) a bien montré le cas que je fais du
noble métier d’avocat ; et mon respect pour la magistrature ne sera pas
plus suspecté, quand on saura dans quelle école j’en ai recherché la
leçon, quand on lira le morceau suivant, aussi tiré d’un moraliste,
lequel parlant des magistrats, s’exprime en ces termes formels :

 « Quel homme aisé voudrait, pour le plus modique honoraire, faire le
métier cruel de se lever à quatre heures, pour aller au palais tous les
jours s’occuper, sous des formes prescrites, d’intérêts qui ne sont
jamais les siens ; d’éprouver sans cesse l’ennui de l’importunité, le
dégoût des sollicitations, le bavardage des plaideurs, la monotonie des
audiences, la fatigue des délibérations, et la contention d’esprit
nécessaire aux prononcés des arrêts, s’il ne se croyait pas payé de
cette vie laborieuse et pénible, par l’estime et la considération
publique ? et cette estime est-elle autre chose qu’un jugement, qui n’est
même aussi flatteur pour les bons magistrats, qu’en raison de sa rigueur
excessive contre les mauvais ? »

Mais quel écrivain m’instruisait ainsi par ses leçons ? Vous allez croire
encore que c’est PIERRE-AUGUSTIN ; vous l’avez dit ; c’est lui, en 1773,
dans