Page:Beaumarchais - Œuvres choisies, édition 1913, tome 2.djvu/48

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FIGARO. Voilà précisément la cause de mon malheur, Excellence. Quand on a rapporté au ministre que je faisais, je puis dire assez joliment, des bouquets à Chloris, que j’envoyais des énigmes aux journaux, qu’il courait des madrigaux de ma façon ; en un mot, quand il a su que j’étais imprimé tout vif, il a pris la chose au tragique et m’a fait ôter mon emploi, sous prétexte que l’amour des lettres est incompatible avec l’esprit des affaires.

LE COMTE. Puissamment raisonné ! Et tu ne lui fis pas représenter…

FIGARO. Je me crus trop heureux d’en être oublié, persuadé qu’un grand nous fait assez de bien quand il ne nous fait pas de mal.

LE COMTE. Tu ne dis pas tout. Je me souviens qu’à mon service tu étais un assez mauvais sujet.

FIGARO. Eh ! mon Dieu, Monseigneur, c’est qu’on veut que le pauvre soit sans défaut.

LE COMTE. Paresseux, dérangé…

FIGARO. Aux vertus qu’on exige dans un domestique, Votre Excellence connaît-elle beaucoup de maîtres qui fussent dignes d’être valets ?

LE COMTE, riant. Pas mal ! Et tu t’es retiré en cette ville ?

FIGARO. Non, pas tout de suite.

LE COMTE, l’arrêtant. Un moment… J’ai cru que c’était elle…

Dis toujours, je t’entends de reste.

FIGARO.