Page:Beaumarchais - Œuvres choisies, édition 1913, tome 2.djvu/89

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doucement, seigneur soldat ; n’aime point qu’on regarde ma femme de si près.

LE COMTE. Elle est votre femme ? je

BARTHOLO. Eh quoi donc ?

LE COMTE. Je vous ai pris pour son bisaïeul paternel, maternel, sempiternel : il y a au moins trois générations entre elle et vous.

BARTHOLO lit un parchemin. « Sur les bons et fidèles témoignages qui nous ont été rendus… »

LE COMTE donne un coup de main sous les parchemins, qui les envoie au plancher. Est-ce que j’ai besoin de tout ce verbiage ?

BARTHOLO. Savez-vous bien, soldat, que si j’appelle mes gens, je vous fais traiter sur-le-champ comme vous le méritez ?

LE COMTE. Bataille ? Ah, volontiers, bataille ! c’est mon métier à moi (montrant son pistolet de ceinture), et voici de quoi leur jeter de la poudre aux yeux. Vous n’avez peut-être jamais vu de bataille, Madame ?

ROSINE. Ni ne veux en voir.

LE COMTE. Rien n’est pourtant aussi gai que bataille. Figurez-vous (poussant le docteur) d’abord que l’ennemi est d’un côté du ravin, et les amis de l’autre. (A Rosine, en lui montrant la lettre.) Sortez le mouchoir. (Il crache à terre.) Voilà le ravin, cela s’entend.