m’enfuis de cette maison, et je demande retraite au premier venu.
Qui ne vous recevra point.
C’est ce qu’il faudra voir.
Nous ne sommes pas ici en France, où l’on donne toujours raison aux femmes : mais, pour vous en ôter la fantaisie, je vais fermer la porte.
Ah ciel ! que faire ?… Mettons vite à la place la lettre de mon cousin, et donnons-lui beau jeu de la prendre.
Ah ! j’espère maintenant la voir.
De quel droit, s’il vous plaît ?
Du droit le plus universellement reconnu, celui du plus fort.
On me tuera plutôt que de l’obtenir de moi.
Madame ! madame !…
Ah ! quelle indignité !…
Donnez cette lettre, ou craignez ma colère.
Malheureuse Rosine !
Qu’avez-vous donc ?
Quel avenir affreux !
Rosine !
J’étouffe de fureur.
Elle se trouve mal.
Je m’affaiblis, je meurs.
Dieux ! la lettre ! Lisons-la sans qu’elle en soit instruite.
Infortunée ! ah !…
Quelle rage a-t-on d’apprendre ce qu’on craint toujours de savoir !
Ah ! pauvre Rosine !
L’usage des odeurs… produit ces affections spasmodiques.
(Il lit par-derrière le fauteuil en lui tâtant le pouls. Rosine se relève un peu, le regarde finement, fait un geste de tête, et se remet sans parler.)
Ô Ciel ! c’est la lettre de son cousin. Maudite inquiétude ! Comment l’apaiser maintenant ? Qu’elle ignore au moins que je l’ai lue !
Ah !…
Eh bien ! ce n’est rien, mon enfant ; un petit mouvement de vapeurs, voilà tout ; car ton pouls n’a seulement pas varié.
Il a remis la lettre ! fort bien.
Ma chère Rosine, un peu de cette eau spiritueuse.
Je ne veux rien de vous : laissez-moi.
Je conviens que j’ai montré trop de vivacité sur ce billet.
Il s’agit bien du billet ! C’est votre façon de demander les choses qui est révoltante.
Pardon : j’ai bientôt senti tous mes torts ; et tu me vois à tes pieds, prêt à les réparer.
Oui, pardon ! lorsque vous croyez que cette lettre ne vient pas de mon cousin.
Qu’elle soit d’un autre ou de lui, je ne veux aucun éclaircissement.
Vous voyez qu’avec de bonnes façons, on obtient tout de moi. Lisez-la.
Cet honnête procédé dissiperait mes soupçons, si j’étais assez malheureux pour en conserver.
Lisez-la donc, monsieur.
À Dieu ne plaise que je te fasse une pareille injure !
Vous me contrariez de la refuser.
Reçois en réparation cette marque de ma parfaite confiance. Je vais voir la pauvre Marceline, que ce Figaro a, je ne sais pourquoi, saignée du pied : n’y viens-tu pas aussi ?