Pas autrement que vous le dites : Tiens, petite Fanchette, rends cette épingle à ta belle cousine, et dis-lui seulement que c’est le cachet des grands marronniers.
Des grands…
Marronniers. Il est vrai qu’il a ajouté : Prends garde que personne ne te voie !
Il faut obéir, ma cousine : heureusement personne ne vous a vue. Faites donc joliment votre commission, et n’en dites pas plus à Suzanne que monseigneur n’a ordonné.
Et pourquoi lui en dirais-je ? Il me prend pour un enfant, mon cousin.
Scène XV
Eh bien, ma mère ?
Eh bien, mon fils ?
Pour celui-ci !… Il y a réellement des choses…
Il y a des choses ! Hé ! qu’est-ce qu’il y a ?
Ce que je viens d’entendre, ma mère, je l’ai là comme un plomb.
Ce cœur plein d’assurance n’était donc qu’un ballon gonflé ? une épingle a tout fait partir !
Mais cette épingle, ma mère, est celle qu’il a ramassée !…
La jalousie ! Oh ! j’ai là-dessus, ma mère, une philosophie… imperturbable ; et si Suzanne m’attrape un jour, je le lui pardonne…
Oh, ma mère, on parle comme on sent : mettez le plus glacé des juges à plaider dans sa propre cause, et voyez-le expliquer la loi ! — Je ne m’étonne plus s’il avait tant d’humeur sur ce feu ! — Pour la mignonne aux fines épingles, elle n’en est pas où elle le croit, ma mère, avec ses marronniers ! Si mon mariage est assez fait pour légitimer ma colère, en revanche il ne l’est pas assez pour que je n’en puisse épouser une autre, et l’abandonner…
Bien conclu ! Abîmons tout sur un soupçon. Qui t’a prouvé, dis-moi, que c’est toi qu’elle joue, et non le comte ? L’as-tu étudiée de nouveau, pour la condamner sans appel ? Sais-tu si elle se rendra sous les arbres ? à quelle intention elle y va ? ce qu’elle y dira, ce qu’elle y fera ? Je te croyais plus fort en jugement !
Elle a raison, ma mère : elle a raison, raison, toujours raison ! Mais accordons, maman, quelque chose à la nature : on en vaut mieux après. Examinons en effet avant d’accuser et d’agir. Je sais où est le rendez-vous. Adieu, ma mère.
Scène XVI
Adieu ; et moi aussi, je le sais. Après l’avoir arrêté, veillons sur les voies de Suzanne, ou plutôt avertissons-la ; elle est si jolie créature ! Ah ! quand l’intérêt personnel ne nous arme point les unes contre les autres, nous sommes toutes portées à soutenir notre pauvre sexe opprimé, contre ce fier, ce terrible… (en riant) et pourtant un peu nigaud de sexe masculin.
ACTE CINQUIÈME
Scène I
Dans le pavillon à gauche, a-t-il dit. C’est celui-ci. S’il allait ne pas venir à présent ! mon petit rôle… Ces vilaines gens de l’office qui ne voulaient pas seulement me donner une orange et deux biscuits ! — Pour qui, mademoiselle ? — Eh bien, monsieur, c’est pour quelqu’un. — Oh ! nous savons. — Et quand ça serait ? Parce que monseigneur ne veut pas le voir, faut-il qu’il meure de faim ? — Tout ça pourtant m’a coûté un fier baiser sur la joue !… Que sait-on ? il me le rendra peut-être. (Elle voit Figaro qui vient l’examiner ; elle fait un cri.) Ah !…
Scène II
C’est Fanchette ! (Il parcourt des yeux les autres à