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parut, croyant rêver, et demeura charmé de l’esprit de l’inconnue, qu’il ne put jamais engager à se démasquer : tout ce qu’il en put obtenir, c’est qu’elle reviendrait au premier bal avec le même habit. Le prince s’y trouva des premiers ; et quoique l’inconnue y arrivât un quart d’heure après lui, il l’accusa de paresse, et lui jura qu’il s’était beaucoup impatienté. Il fut encore plus charmé de l’inconnue cette seconde fois que la première, et avoua à Laidronette qu’il était amoureux comme un fou de cette personne. J’avoue qu’elle a beaucoup d’esprit, lui répondit sa confidente ; mais si vous voulez que je vous dise mon sentiment, je soupçonne qu’elle est encore plus laide que moi : elle connaît que vous l’aimez, et craint de perdre votre cœur, quand vous verrez son visage. Ah ! madame, dit le prince, que ne peut-elle lire dans mon âme ! L’amour qu’elle m’a inspiré, est indépendant de ses traits : j’admire ses lumières, l’étendue de ses connaissances, la supériorité de son