Page:Beaumont - Marie ou l’esclavage aux États-Unis, éd. Gosselin, 1840.djvu/261

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diminuer le nombre des esclaves, mais seulement pour empêcher leur augmentation ; or, ces quarante-sept millions font plus de la moitié de la somme destinée au rachat.

On voit que l’étendue et la durée du sacrifice pécuniaire que le gouvernement des États-Unis aurait à s’imposer ne peuvent se comparer qu’à son peu d’efficacité. Croit-on que le gouvernement américain entreprenne jamais une semblable tâche à l’aide d’un pareil moyen ?

Je ne sais si un peuple qui se gouverne lui-même fera jamais un sacrifice aussi énorme sans une nécessité urgente. Les masses, habiles et puissantes pour guérir les maux présents qu’elles sentent, ont peu de prévoyance pour les malheurs à venir. L’esclavage, qui peut, à la vérité, devenir un jour, pour toute l’Union, une cause de trouble et d’ébranlement, n’affecte actuellement et d’une manière sensible qu’une partie des États-Unis, le Sud ; or, comment admettre que les pays du Nord qui, en ce moment, ne souffrent point de l’esclavage, iront, dans l’intérêt des contrées méridionales, et par une vague prévision de périls incertains et à venir, consacrer au rachat des esclaves du Sud des sommes considérables dont l’emploi, fait au profit de tous, peut leur procurer des avantages actuels et immédiats. Je crois qu’espérer du gouvernement fédéral des États-Unis un pareil sacrifice, c’est méconnaître les règles de l’intérêt personnel, et ne tenir aucun compte ni du caractère américain, ni des principes d’après lesquels procède la démocratie.

Mais l’obstacle qui résulte du prix exorbitant du rachat n’est pas le seul.

Supposons que cette difficulté soit vaincue.

QUATRIÈME OBJECTION. — Les nègres étant affranchis que deviendront-ils ? se bornera-t-on à briser leurs fers ? les laissera-t-on libres à côté de leurs maîtres ? Mais si les esclaves et les tyrans de la veille se trouvent face à face avec des forces à peu près égales, ne doit-on pas craindre de funestes collisions ?

On voit que ce n’est pas assez de racheter les nègres, mais qu’il faut encore, après leur affranchissement, trouver un