Page:Beaumont - Marie ou l’esclavage aux États-Unis, éd. Gosselin, 1840.djvu/343

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dont je viens de parler, certains individus parviennent à exercer plus d’influence que les autres sur leurs semblables. Mais cette influence n’a aucun fondement durable ; elle s’acquiert, pour ainsi dire, par hasard, s’exerce par occasion, et ne s’étend jamais qu’à un petit nombre d’objets.

— « L’Indien, dit Tanner, page 125, qui commande une troupe de guerre, n’a aucun contrôle sur ceux qui l’accompagnent ; il n’exerce sur eux qu’une influence personnelle : dans cette circonstance, dit-il ailleurs, (page 172) on me choisit pour chef ; comme nous n’avions en vue que de trouver à vivre, et qu’on me connaissait bon chasseur, on avait raison d’agir ainsi. »

Les hommes qui composent ces nations sauvages sont trop dispersés pour pouvoir contracter l’habitude d’une obéissance commune. Ils échappent à tout contrôle par le fait même de leur misère. On n’a rien à attendre d’eux, et ils n’ont rien à perdre : il est donc difficile de découvrir parmi ces nations indiennes du Nord quelque chose qui ressemble à une société. L’individu n’y trouve de protection qu’en lui-même, comme dans l’état de nature. Le livre tout entier de Tanner est aussi rempli de récits d’actes de violence et de brigandage que de maux et de misère. Nulle part on n’aperçoit d’autorité prête à servir de médiatrice entre le fort et le faible, entre l’offenseur et l’offensé. Les Indiens ont perdu jusqu’à l’idée de ce pouvoir tutélaire. Quand un Indien du Nord est victime d’un crime, il se venge s’il est le plus fort, et fuit s’il est le plus faible : dans aucun des deux cas la pensée d’un pouvoir social ne se présente à son esprit. En ceci, comme en tout le reste, les opinions mettent sur la trace des coutumes et des lois.

« Un Indien, dit Tanner, page 208, s’attend toujours à ce que l’outrage qu’il fait sera vengé par celui qui en a souffert ; et un homme qui omettrait de tirer vengeance d’une injure n’inspirerait aucune estime. »

Les deux parties du tableau sont sous les yeux du lecteur qui maintenant peut juger.

Il y a deux cents ans, les indigènes de l’Amérique du Nord formaient des tribus de chasseurs ; un domicile fixe, des