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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

maisons. Mme Desbordes et Marceline cherchèrent l’opulent cousin. Mais on avait brûlé la maison de ce blanc ; voire, on lui avait égorgé sa femme. Et il s’était sauvé.

Elles étaient venues de Douai, les malheureuses, à grand peine, à grand effort de courage et d’argent, pour constater cela. Et le péril, la peur !… Bientôt, la fièvre jaune se répandit à travers la colonie. Mme Desbordes fut prise ; et elle mourut. Voilà Marceline, à quinze ans, toute seule, parmi des sauvages terribles, dans le sang et dans l’incendie, toute seule !…

Évidemment, puisqu’elle ne mourut pas, c’est que de bonnes gens la recueillirent. On ne connaît pas le détail de toutes les péripéties nombreuses qui, enfin, lui permirent de rentrer en France.

Il y a une note d’elle qui raconte un peu son retour. Je n’en retiens qu’un trait. Un jour, en mer, la tempête se déclara. Cette petite romantique de Marceline la voulut voir. On ne pouvait plus tenir, sur le pont, qui était fortement secoué, qui embarquait des paquets d’eau. Alors, elle exigea — car elle était douée d’énergie — qu’on l’attachât avec des cordes solides dans les haubans, de sorte qu’elle assistât au spectacle de la furie prodigieuse. Il est amusant de remarquer que, dix ans plus tôt, un jeune Breton, rêveur autant qu’elle et chimérique autant, partit pour l’Amérique, rencontra la tempête et,