ser cette fois à sa colère, il faudrait bien qu’il fût bon, car il devait être juste.
— Oui, dit-elle au jeune homme, je lui demanderai qu’il aime mon frère ; autrement, je ne veux plus être sa fille. Séchez vos larmes, Henri ; ayez bon espoir, comme moi j’ai bon courage ! Je ne suis qu’une femme, mais Dieu a mis souvent sur nos lèvres des paroles qui persuadent et qui entraînent. Adieu, souvenez-vous que le chagrin est souvent un lien plus sûr pour deux cœurs que la famille. Attendez-moi ici, c’est l’heure où votre père va quitter son cabinet. Moi je serai là, immobile sur le seuil ; quand il passera, je lui dirai : Vous ne pouvez dormir sans embrasser votre fils ! Et il vous embrassera, Henri ; il s’accusera devant vous tout le premier. Adieu, encore une fois ; vous, parlez à Dieu pendant que je vais parler à votre père. Celui-là, Henri, a pitié de ses enfants !
Quand Leclerc sortit de son cabinet de travail, il trouva en effet la jeune fille placée à la porte comme une blanche statue. Elle était si pâle, qu’on eût dit vraiment que c’était d’elle qu’il allait s’agir.
— Que faites-vous là ? que me voulez-vous ? demanda le financier d’un ton rude.
— Je venais, dit Paquette, vous dire qu’il est là… près de vous… bien triste, bien malheureux.
— Et qui donc ?
— Henri, Henri, votre fils, Henri que vous avez repoussé si cruellement ce matin, mais que vous allez rassurer ce soir en le pressant contre votre cœur.
— Henri, dites-vous, Henri, répéta le vieillard d’une voix sourde. Oh ! laissez-moi, laissez-moi !
— Non, je ne vous laisserai pas, je ne souffrirai pas, je vous en préviens, que vous vous couchiez sur une mauvaise action.
— Malheureuse ! Et qui êtes-vous donc pour me parler de Henri ? Savez-vous donc, pouvez-vous savoir…
— Je sais, reprit-elle, que vous m’appelez votre fille. Eh