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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

prince, et surtout ne soufflez mot ! dit le perfide Roquelaure.

Le prince de Monaco obéit.

Assis près de madame de Monaco, le marquis de Grammont semblait alors admirer le croissant d’épis qui se balançait au front de Diane.

— Oui, madame, disait-il avec le feu qu’il eût mis dans le siège de Luxembourg, dût le prince de Monaco même me faire pendre en effigie comme tant d’autres, je suis résolu à obtenir de vous ce que je désire…

— Quoi donc ?

— Cette simple fleur, reprit le marquis en attachant toujours sa vue sur le diadème brillant que portait madame de Monaco.

— Y songez-vous ? ce croissant monté à Gênes, ce cadeau de M. le prince…

— Aussi, rassurez-vous, je ne voulais que vous faire peur. Des diamants ! fi donc ! c’est bon pour M. de Lauzun, qui vous a aimée ; moi je me contente de ceci.

Et, plus leste qu’un page, Grammont enleva adroitement du corsage de la princesse une fleur de son bouquet.

— Que faites-vous, marquis ? si le prince vous voyait !

— Baste ! on ne pend pas si vite les gens. Je n’ai pris qu’une fleur, Lauzun eut pris le bouquet ; demandez plutôt à M. de Monaco.

Et le marquis partit en riant.

— Eh bien ! dit Roquelaure au prince ébahi, en venant le retrouver, qu’en pensez-vous ? Il est temps de vous montrer, je vous laisse avec madame de Monaco.

— Du tout, du tout, j’y renonce et vais de ce pas chercher le marquis… Puis, s’arrêtant tout d’un coup : Eh bien non, ma foi, encore un que je ferai pendre en effigie !

Madame de Monaco venait de rejoindre la maréchale d’Humières ; Roquelaure voyant la place vide, courut trouver mademoiselle de Retz.

— Minerve, dit-il en se penchant à son oreille, est priée