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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

— Je l’ignore, mais c’est bien lui qui m’a laissé cette Bible.

— Et c’est lui aussi qui te crie d’écouter ta mère, dit une voix qui sembla sortir de l’une des portes du boudoir, lente et funèbre comme un glas de mort.

— Que veut dire ceci ? murmura Lauzun, aussi effrayé que s’il eût vu se lever un fantôme.

— Ceci veut dire, mon fils, reprit madame de Lauzun, qu’il est temps de vous amender et de renoncer à vos folies. Cet homme que vous croyez un fantôme est peut-être un homme réel. On a vu parfois de ces apparitions étranges et tenez, ce manteau noir qui traverse votre cour, c’est peut-être celui qui vient de vous donner ce terrible avertissement.

— Homme ou spectre, s’écria Lauzun, il périra !

Et se penchant à la fenêtre, le comte arma la détente d’un pistolet.

La nuit était venue, l’ombre glissait sous les arcades de la cour.

— Henri, murmura madame de Lauzun, Henri, n’attentez pas aux jours de cet homme !

— Pourquoi ?

— Parce que c’est lui qui a sauvé cette jeune fille ; il a amené mademoiselle Fouquet chez moi.

Transporté de rage, Lauzun abaissa le canon du pistolet ; mais l’homme de Pignerol avait déjà fui en poussant un rire strident.

— Le nom de cet homme ? demanda Lauzun à la comtesse.

— Il vous le dira lui-même quand les temps seront venus.


VIII

L’ENTREVUE.


L’hôtel habité par madame de Lauzun la mère étendait d’un côté son vaste jardin sur la rue de Grenelle, de l’autre il étalait sa riche façade sur la rue Saint-Dominique.