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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

Henri Leclerc sentit passer dans ses cheveux un froid mortel, il voulut se précipiter sur le comte, mais Lavardin et d’Alluye s’interposèrent.

— Monsieur de Lauzun, murmura Henri d’une voix sourde, vous avez osé lever la main sur un enseigne de Sa Majesté !

— C’est entre nous à la vie à la mort, répéta le comte, les dents serrées par la rage.

— Je suis à vos ordres ce matin même.

— Ce matin.

— Mais où ?

— À Vincennes, reprit Lauzun en jetant sur d’Alluye un regard sombre, ironique. Monsieur le marquis d’Alluye connaît le chemin, n’est-ce pas ?

D’Alluye se contenta de baisser froidement la tête.

— Parbleu ! dit le comte à Barailles en remontant avec lui dans son carrosse, pour ma dernière fête à la cour, celle-ci pourra compter.


XVII

LE MEURTRE.


Il est six heures du matin.

Lauzun se retrouve dans ce même bois de Vincennes où il a croisé l’épée avec d’Alluye.

Il a pris à peine le temps de choisir, à son hôtel de l’Île, deux excellentes épées, puis il a emmené avec lui dans son carrosse Barailles et Guitry.

L’événement du bal a eu trop de témoins pour que des deux parts les adversaires ne songent pas à se dépêcher.

Cependant le jeune enseigne n’est pas encore arrivé.

Lauzun ne songe qu’à sa rage, il n’est pas fâché d’avoir rencontré une querelle : il se demande seulement en quoi il a pu offenser ce furieux.

Le duel est grave, car Lauzun est un de ces hommes qui